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par plusieurs déluges de peuples qui se sont superposés les uns aux autres : les Celtes, les Romains, les Saxons, les Danois ou les Vikings, les Normands. Ce n’est pas seulement dans les anciens tombeaux que se rencontrent les rudimens de la nation anglaise ; plusieurs des races primitives existent encore : elles occupent à la surface du pays des espaces limités par les montagnes ou par la mer. Là nous pourrons étudier sur le vif la genèse du peuple britannique. L’origine, les alliances, les mœurs, l’état intellectuel de ces groupes distribués selon l’ordre des temps et des lieux, tout cela forme un vaste ensemble de faits peu connus dans lequel nous découvrirons les racines du caractère national. L’Anglais, avec ses traits particuliers, son génie à lui, sa personnalité forte, se dégage par degrés de l’abîme des siècles et du chaos des événemens qui ont à plusieurs reprises agité, renouvelé la population de la Grande-Bretagne. Des monumens de plus d’un genre nous mettront à même de déterminer la nature des trois grandes séries de formation à travers lesquelles on voit le type britannique naître, s’accroître et se constituer définitivement.


I

Le sol de la Grande-Bretagne est un des plus riches en débris celtiques. De nombreux sépulcres ont été ouverts, et, par la nature des objets qui s’y rencontrent, les antiquaires ont pu établir dans la vie de cette race trois époques distinctes : l’âge de pierre, l’âge de bronze, l’âge de fer. On peut voir au British Muséum une salle consacrée aux antiquités celtiques, et qui contient des spécimens très curieux trouvés en Angleterre et en Irlande. On a cherché à exprimer par l’arrangement des exemplaires l’ordre chronologique des faits. Dans la première armoire vitrée se montrent des restes connus sous le nom de pierres celtiques : elles paraissent avoir été attachées à des manches en bois par des courroies de cuir. Ce furent les premières haches. Sur les rayons suivans, vous apercevez d’autres fossiles historiques, des rudimens d’armes, tels que des lames de couteau et des têtes de flèche en silex[1]. Plus loin s’offrent à la vue les premières traces de l’industrie naissante : des marteaux et des haches de pierre percés de manière à s’emmancher dans dubois. Ces cognées de seconde formation ont sans doute servi à abattre les plus anciens arbres des antiques forêts de la Grande-Bretagne,

  1. Il ne faut point confondre ces premières têtes de flèche grossières avec d’autres têtes de flèche en silex qu’on retrouve mêlées à des armes de bronze. Ces dernières sont évidemment d’une autre époque. La forme et le fini du travail indiquent assez que des instrumens de fer ont été employés pour les fabriquer.