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ÉTUDES D’HISTOIRE PRIMITIVE.

Ariens. De même que l’âge de pierre dura très inégalement sur la terre, puisque des peuplades y étaient encore demeurées pendant que le reste du genre humain l’avait dépassé depuis bien des siècles, de même l’âge de cuivre eut une durée variable chez les peuples antiques. Au temps de la guerre de Troie, les Grecs n’en étaient pas sortis : dans Homère, tous les engins de guerre sont en cuivre, l’or et l’argent sont employés dans les armes défensives, les lances meurtrières qui atteignent l’adversaire de loin sont pourvues d’un airain aigu et tranchant ; mais le fer n’est nulle part, sauf comme une rareté de grand prix, témoignant du moins que des peuples plus industrieux que les Hellènes avaient déjà extrait et façonné ce métal. Bien plus tard encore, les Gaulois, quand ils passaient les Alpes et guerroyaient contre les Romains, n’avaient que des armes de cuivre, et ce ne fut pas une de leurs moindres infériorités ; mais finalement le cuivre, comme la pierre avant lui, fut dépossédé du service par quelque chose de plus puissant.

L’âge de fer succéda en effet. Aller chercher le minerai, le transformer en métal, façonner ce métal était une entreprise qui, dépassant les ressources et l’habileté des temps anciens, devenait possible à des mains et à des esprits plus exercés. Quand le fer fut entré dans les usages de la vie, la force humaine fut immensément multipliée. La pierre et le cuivre avaient préparé cet accroissement, qui, à son tour, fut la préparation à un état ultérieur. De même que les Grecs devant Troie approchaient de l’âge de fer, de même les Gaulois y arrivaient quand César les conquit, tant fut lente la propagation des plus utiles découvertes ! Il n’est pas besoin de dire combien fut grande la révolution que le fer, comme instrument et comme arme, produisit dans les affaires du monde ; mais il est besoin de ne pas perdre de vue quelle en est la place dans la série. Rien dans ces termes ne peut être interverti ; on n’alla point de l’âge de fer à l’âge de pierre ; la nature des choses comme la nature de l’esprit humain s’y opposèrent ; on alla de l’âge de pierre à l’âge de fer par l’intermédiaire du cuivre, la nature des choses comme la nature de l’esprit humain le voulurent. Ces deux conditions, qui réagissent incessamment l’une sur l’autre, déterminent, comme un phénomène régulier et naturel, le développement des sociétés.

Telle est la succession de ces trois âges qui, tout réels qu’ils sont, peuvent presque être appelés mythologiques, car ils se confondent dans les nébulosités de l’histoire. Ils étaient probablement accomplis, pour les peuples les plus avancés en civilisation, à l’époque où l’empire des Égyptiens nous apparaît fondé sur les bords du Nil, et l’on sait qu’aucune nation n’est historiquement aussi ancienne que la nation égyptienne ; le genre humain n’a point d’autres annales