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général, fort imparfaitement connus. Aussi cette connaissance n’a-t-elle encore pu nous montrer aucun lien, aucune loi d’ensemble présidant à ces divers phénomènes et les reliant entre eux, et c’est pourquoi, tout en attendant de l’avenir les données qui nous manquent, Maury a dû chercher la solution du problème par une voie détournée. Dans l’atmosphère, l’étude des mouvemens de l’air à la surface du globe l’avait conduit à la connaissance de l’ensemble de la circulation aérienne. Il cherche de même ici à connaître les courans de surface de l’Océan pour en conclure plus tard la circulation sous-marine, et, s’aidant à cet effet des observations de température, les seules dont en pareille matière l’autorité rigoureuse ne puisse être aujourd’hui contestée, il parcourt les mers du globe le thermomètre à la main, afin de déduire les mouvemens superficiels de l’Océan de la chaleur relative de ses eaux. Nous ne faisons du reste qu’indiquer cette étude, dont le caractère est trop spécial pour que les résultats puissent en être présentés ici avec intérêt.

Nous n’indiquons de même qu’en passant tout un ordre de recherches découlant naturellement de la distribution de la chaleur à la surface de l’Océan, et consistant à montrer l’influence des courans sur la climatologie des divers pays. Un semblable sujet exigerait à lui seul une étude complète et séparée ; de plus il a déjà été abordé dans la Revue par un savant distingué[1], et notre but est surtout de faire ressortir celles des idées de Maury qui font de lui un véritable novateur scientifique.

Revenons donc aux causes que nous avons assignées à la circulation océanienne, et cherchons, au moyen de quelques chiffres, à donner une idée de la puissance de leurs effets. Au premier rang se trouvent l’évaporation et la précipitation, dont le résultat se traduit en pluies d’une hauteur moyenne annuelle de 1m50 pour toute la surface du globe. On a vu que cette évaporation, bien qu’opérée sur l’étendue entière des mers, était surtout concentrée dans les régions alizées, auxquelles serait ainsi enlevée chaque année une couche liquide d’environ 5 mètres d’épaisseur. Cette masse annuelle de pluie formerait 775,876 kilomètres cubes ; or les deux océans Pacifique et Indien, que nous pouvons ici considérer comme une seule mer, occupent en superficie la moitié de notre globe. Nous resterons donc probablement au-dessous de la vérité en admettant que la moitié de ces 775,876 kilomètres cubes soit chaque année

    d’hui, grâce surtout aux travaux des Américains, le curieux phénomène offert par ce puissant fleuve océanien nous est presque complètement connu. L’étude de son trajet, de ses causes, de son influence climatologique, des déplacemens périodiques annuels qui le font osciller à la surface de l’Océan, etc., forme une des parties les plus utiles et les plus intéressantes de l’ouvrage de Maury.

  1. M. Babinet, livraison du 1er octobre 1854.