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de Foix, qui venait de France avec de nouveaux renforts, l’obligea de détacher une partie de ses troupes pour les envoyer au-devant de Lescun et lui ouvrir un passage à travers la Lomelline, occupée par les ennemis[1].

Francesco Sforza était arrivé, et jusque-là s’était tenu dans Pavie. Il profita de cet affaiblissement momentané de Lautrec. Il se concerta avec Prospero Colonna, qu’avait déjà joint Jérôme Adorno avec une bande de quatre mille Tyroliens ou Souabes, et qui vint à sa rencontre jusqu’à Sesto. Sortant alors de Pavie pendant la nuit et dérobant sa marche à Lautrec, il conduisit ses lansquenets à Milan, où il entra le 4 avril 1522, après une longue absence, au milieu des plus grands transports d’enthousiasme[2].

Les deux projets de Lautrec contre Milan et contre la réunion des impériaux avaient échoué. En réussissant, le premier aurait eu une influence décisive sur l’issue de la guerre, le second aurait contraint les ennemis, tenus en échec, à rester enfermés dans les villes. Qu’allait tenter Lautrec, devenu plus fort qu’auparavant après la jonction de Lescun, dont les troupes avaient pris sur leur passage Novare et Vigevano, qui gênaient ses communications avec la France ? Il devait employer sans retard cette belle armée et remporter avec elle quelque grand avantage, s’il ne voulait pas l’entendre murmurer et la voir se dissoudre. Pavie était un peu dégarnie depuis le départ des lansquenets, il alla l’assiéger.

Prospero Colonna sentit de quelle importance il était de ne pas laisser prendre la seconde ville du duché. Il envoya dans Pavie un assez puissant renfort, qui y pénétra heureusement. Pouvant alors se mettre à la tête d’assez de troupes pour paraître en campagne, il sortit de Milan et se dirigea du côté de Pavie. Il était résolu à en traverser le siège et à ne pas laisser tomber cette ville entre les mains des Français, déjà maîtres d’Alexandrie, de Crémone, de Lodi, et qui, en l’occupant, auraient enfermé la capitale du duché dans un cercle de places fortes. Il se porta vers la Chartreuse, où il prit une position très avantageuse, protégée par les murailles d’un parc, à quatre milles de distance de l’armée française. De là il inquiéta Lautrec, qui rencontrait une vive résistance de la part de la garnison assiégée[3]. Lautrec ne se trouva plus en sûreté dans le voisinage

  1. Gal. Capella, ibid., p. 1266-1267. — Guicciardini, lib. XIV. — Martin Du Bellay, t. XVII, p. 366-375. — Belcarius, fol. 504.
  2. Gal. Capella, ibid., p. 1267. — Cronoca del Burigozzo, ibid., p. 437. « Fece la intrata in la città mediolanense con allegria et tutto il populo con sonar di campane, sparare di artelleria parendo ruinasse il mondo. Mai fu visto nè audito tanto triumpho. — Cronaca Grumello, citée dans Verri, t. II, c. 23, p. 186.
  3. Gal. Capella, ibid., f. 1268. — Guicc, lib. XIV. — Du Bellay, ibid., p. 275-276.