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par les gouvernemens postérieurs. C’est le droit romain accommodé aux mœurs et aux usages du temps, et dont les dispositions savantes constitueraient une des plus belles organisations judiciaires, si, éparpillées dans des édits et décrets de toutes les époques, elles ne présentaient pas d’immenses difficultés pour être bien connues. Un travail qui réunirait en un seul code cette législation, avec les modifications que demande la civilisation moderne, devient de plus en plus urgent : il faciliterait l’étude de la jurisprudence et simplifierait la procédure.

Tous les juges et tous les tribunaux fonctionnent publiquement ; mais les plaidoiries en matière civile et commerciale sont écrites, tandis qu’au criminel elles peuvent être orales. On a dernièrement retiré au jury la connaissance de quelques crimes, comme la traite des noirs, la fabrication de la fausse monnaie, la banqueroute et la résistance aux ordres de la justice, parce qu’on a reconnu la nécessité d’une rigueur que les jurés ne sont presque jamais disposés à montrer. Le code criminel et le code commercial satisfont complètement aux besoins du pays. Le dernier ne date que de 1850, de cette heureuse époque où le plus parfait accord régnait entre le gouvernement et les chambres, où l’on a vu se produire tant d’utiles réformes dans toutes les branches du service public. La partie de la législation civile qui, plus qu’aucune autre, appelle des modifications, est celle qui a trait aux hypothèques et aux privilèges. C’est un véritable chaos. Depuis 1850, le gouvernement s’efforce d’y apporter l’ordre et la lumière. C’est là une question fort grave qu’on espère voir bientôt résolue. Tant qu’on n’aura pas réformé cette partie de la législation, on ne pourra établir au Brésil ni banques hypothécaires, ni système foncier, et le crédit personnel restera une garantie beaucoup plus solide que le crédit foncier.

La sûreté individuelle existe au Brésil, surtout dans les chefs-lieux des provinces ; mais nous ne pouvons en dire autant de l’intérieur du pays. Le Brésil est trop vaste, les centres de population y sont trop éloignés les uns des autres ; la justice n’y peut pas fonctionner toujours librement ; en outre, les magistrats ont besoin d’être appuyés par les autorités locales et par la population : or cet appui leur manque souvent. Les témoins ont peur de déposer, et les jurés craignent aussi de montrer de la sévérité et de remplir consciencieusement leurs devoirs. Il ne faut cependant pas s’exagérer le mal : les Brésiliens sont généralement d’un caractère doux, et ne connaissent point les grandes passions qui font naître les grands crimes. La statistique criminelle de l’année 1856 prouve que, si malheureusement on remarque encore dans le peuple un certain penchant pour les vengeances individuelles, le nombre des crimes commis diminue sensiblement. Les mœurs s’améliorent, la confiance dans la justice