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où se trouvent de vastes carrières exploitées pour la construction de la ville, et gagne directement le plateau; l’autre, dite la route des Sapeurs, le contourne en descendant le cours de la Tchernaïa et longeant ensuite les bords de la baie. Grâce à ces facilités, il était possible à une armée de franchir ce mauvais pas sur plusieurs colonnes, considération décisive dans une opération qui demandait avant tout de la célérité. Il n’y avait pas du reste à opter, car plus loin les monts Sapoun n’offrent d’autre accès que celui dont les Russes avaient profité pour tracer la route Woronzof, de Sébastopol à Balaclava, et depuis l’affaire du 25 octobre les Français avaient élevé de ce côté plusieurs batteries bien armées qui ajoutaient à la difficulté d’une attaque sur ce point.

La plus simple prévoyance commandait aux Anglais de se couvrir de même du côté d’Inkerman. Sur les instances de sir de Lacy Evans, lord Raglan s’était décidé à faire commencer deux petits ouvrages, dont l’un coupait à angle droit la vieille route de poste sur le point où elle sort du ravin des Carrières; cet ouvrage était à peine ébauché et n’avait aucune valeur sérieuse. L’autre, un peu plus important, était une redoute élevée sur un contre-fort des monts Sapoun, qui commande à la fois la vallée et le ravin des Carrières. Cette redoute devait être armée de deux pièces Lancastre. Par une incroyable négligence, ces pièces n’étaient pas encore en batterie. La nature rocheuse du terrain n’avait pas permis de creuser profondément le fossé, mais un épaulement formé de sacs-à-terre était suffisant pour abriter les hommes. Le point d’appui que les Anglais y trouvèrent fit jouer à cette redoute un rôle important dans le combat.

Le camp de la 2e division anglaise, formant l’extrême droite, s’étendait en arrière de la batterie sur un mamelon qui domine tout cet espace. Le reste de l’armée, moins la brigade écossaise du général Colin Campbell, campait sur la même ligne, ayant ainsi sa droite aux monts Sapoun et sa gauche au ravin qui, en arrivant à la baie, forme le port de Sébastopol. L’espace compris à gauche, entre le ravin et la mer, était occupé par les 3e et 4e divisions françaises, commandées par le général Forey. En arrière, sur les monts Sapoun, le front tourné vers la vallée de Balaclava, se trouvaient les 1re et 2e divisions françaises, formant le corps d’observation du général Bosquet; un peu plus loin, vers la mer, mais toujours sur le plateau, la 5e division Levaillant, la 1er brigade de la 6e division et la brigade de cavalerie d’Allonville; dans Balaclava et aux environs, la brigade écossaise, la brigade des soldats de marine, la cavalerie anglaise et les Turcs.

L’armée russe était répartie tout autour du plateau : dans Sébastopol, dans le camp de Mackensie, et dans la vallée de Balaclava.