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à une réduction quelconque, alors que les frais de transport proprement dits sont bien près d’être réduits au minimum. Il faut même remarquer que les charbons anglais, pénétrant en France par la Seine, la Loire, la Gironde, c’est-à-dire par des voies navigables plus avantageuses à tous égards, se trouvent dans des conditions plus favorables que les charbons indigènes. C’est du reste affaire au gouvernement, qui est le propriétaire des canaux, de voir ce qu’exigent réellement les intérêts généraux qu’il représente : l’industrie houillère, pour être au nombre des principales victimes de l’état actuel des choses, n’est pas la seule industrie qui ait le droit de se plaindre.

En somme, on peut dire qu’en moyenne générale le prix de transport forme plus de la moitié du prix de vente des combustibles minéraux, malgré une certaine tendance à un abaissement que produit l’amélioration de nos voies de communication ; mais, si on examine en détail la situation des bassins producteurs, on trouve par exemple que plus de la moitié des cinquante départemens qui consomment de la houille du bassin de la Loire la paient quatre, cinq et six fois plus cher que sur la mine ; des résultats analogues se produisent dans nos bassins du Nord et de Saône-et-Loire, qui viennent immédiatement après quant au nombre des départemens qu’ils approvisionnent en totalité ou en partie. Le prix d’achat des combustibles minéraux sur le lieu d’extraction varie lui-même, on le comprend, entre des limites fort éloignées, qui dépendent de circonstances locales ; pour ne considérer que des cas extrêmes, ce prix est de 54 centimes dans l’Aveyron et de 3 francs dans le Haut-Rhin. Il n’y a qu’une différence de plusieurs centimes entre les prix de vente de nos deux grands bassins de la Loire et du Nord. Dès que la houille a parcouru 200 kilomètres sur les voies navigables, 150 sur les voies ferrées, 50 sur les voies de terre ordinaire, elle a au moins doublé de valeur. Ce résultat, que j’emprunte au comité des houillères, est la protection la plus efficace pour notre industrie des combustibles minéraux, notamment au centre de la France, alors même qu’il sera atteint par le progressif et utile envahissement de notre réseau ferré. Les frais de transport qui augmentent forcément le prix des houilles étrangères d’une manière sensible pourront abaisser celui des houilles indigènes, mais ne mettront point en péril sérieux l’industrie minérale de la France, comme on affecte de le croire. Loin d’admettre les plaintes que font entendre les intéressés, je crois au contraire qu’ils touchent de beaux bénéfices. Dans certains cas, ils savent parler de l’avenir brillant réservé à leurs entreprises, ils savent rappeler que dans quelques-unes le capital engagé a produit un intérêt excessif. Sans prendre pour type ce fameux denier d’Anzin, dont la valeur dépasse, dit-on, 150,000 francs, et les