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importation toute fraîche, voici les omnibus du chemin de fer de Saragosse qui se distinguent par l’absence des ornemens superflus, et qui représentent l’utile à côté de la fantaisie. Toutes ces voitures font vingt voyages et ne peuvent suffire ; je ne parle pas des voitures des riches, qui sont comme celles de tous les autres pays, de même qu’il n’y a rien qui ressemble à une pièce de cent sous comme une pièce de cinq francs.

Les Espagnols se gardent bien d’avoir les taureaux le dimanche, ce qui les priverait d’un jour de fête ; ils les ont le lundi. Le bureau, dans la rue d’Alcala, est ouvert trois jours à l’avance, et pendant trois jours on y voit une queue comme on n’en voit pas aux théâtres. De grandes affiches placardées dans toute la ville reproduisent le dessin du cirque avec les gradins et les loges, ce qui les fait ressembler à un grand jeu de l’oie. Elles contiennent les noms des éleveurs, qui servent aussi aux taureaux. Le premier éleveur aujourd’hui est le duc de Veraguas, un descendant de Christophe Colomb ; ses taureaux s’appellent des Veraguas. L’affiche donne aussi les noms des combattans, lidiadores, et la représentation, comme le départ des paquebots, est annoncée avec cette réserve : « Si le temps le permet. »

Les courses commencent à cinq heures ; il est bon cependant d’arriver un peu à l’avance pour voir se garnir le vaste amphithéâtre. La plaza peut contenir environ quinze mille spectateurs, et elle est toujours comble ; encore la course de l’après-midi n’est-elle considérée que comme demi-course, média corrida ; une course entière, corrida entera, se fait en deux représentations : une le matin, l’autre le soir ; Ces jours-là, on tue quatorze taureaux, et dans cette ville qui n’a pas trois cent mille âmes, il se trouve près de trente mille hommes, femmes et enfans, pour courir à cette arène sanglante. On donnait une course entière l’autre jour, un dimanche, au bénéfice de l’hôpital général de la ville, et en considération du but pieux (piadoso objeto) du spectacle, on en avait augmenté les prix. Matin et soir, tout a été rempli du haut en bas.

Un système qui a d’excellens résultats, et qui contribue beaucoup à entretenir l’ordre dans une foule si nombreuse et si tumultueuse c’est le numérotage des places. Non-seulement toutes les loges, mais toutes les stalles de tous les degrés ont leur numéro ; il y a aussi des numéros pour chaque rangée, chaque section, de sorte que les quinze mille spectateurs trouvent leur chemin et leur place sans difficulté. Un complément de ce système, c’est le numérotage des loges en dehors, c’est-à-dire du côté de la scène : à l’aide de cette indication, on peut suivre et trouver son monde et faire à volonté soit des observations, soit des visites.

En arrivant, entrez d’abord dans l’arène. Elle l’est libre, les amateurs