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tives. Son vizir Khan-Dowran cherchait à traiter avec l’ennemi, tout en préparant une armée pour l’arrêter dans ses dévastations; mais les Mahrattes, qui faisaient semblant de prêter l’oreille aux propositions de paix, n’en continuaient pas moins de parcourir le pays et de le rançonner. Les troupes impériales, commandées par le frère du vizir, se mirent enfin en campagne, décidées à frapper un grand coup. Holkar ne daigna pas même les attaquer en personne. Le jour, il les faisait harceler par des bandes de cavaliers; la nuit, il lançait des fusées dans leur camp et continuait à lever des tributs sur son passage, rassemblant des sommes considérables qu’il expédiait fidèlement au peshwa. Quelques forts isolés restaient encore au pouvoir des officiers de l’empereur, mais le Malwa et le Candeish étaient complètement envahis. Cédant aux désirs de Kanta-Dji-Kaddam-Bhandya, son ancien chef de clan, qui le priait de l’aider à reconquérir ses possessions du Gouzerate[1], Holkar descendit dans cette province, y leva des contributions, soumit les villes les plus considérables, et se retira aussi vite qu’il était venu. Selon sa coutume, il avait traversé le pays comme un ouragan, sans trouver nulle part de résistance sérieuse.

La position de l’empereur Mohammed-Shah devenait de plus en plus critique. Il désirait à tout prix acheter la paix; mais le peshwa, qui avait besoin de beaucoup d’argent pour entretenir des armées puissantes, élevait si haut ses prétentions, que la cour de Dehli ne pouvait les accepter sans honte. Badji-Rao ne réclamait pas moins que la cession, à titre de fiefs, de provinces entières, l’expulsion des Rohillas établis dans divers districts du Malwa, une somme de cinquante lacks de roupies, la possession de places fortes de premier ordre et de villes importantes, telles que Bénarès, Allahabad, Gaya[2], etc. Tandis qu’on négociait, les armées continuaient à se mouvoir de part et d’autre. Les Mahrattes, après avoir laissé leurs gros bagages dans le Bandelkand, poussèrent une pointe dans le Doab[3]. Molhar-Rao-Holkar commandait cette troupe hardie, qui s’avançait témérairement au-delà de la Djamouna; mais forcé bientôt de revenir sur ses pas, il rejoignit le peshwa, dont l’armée campait presque sous les murs de Dehli. Celui-ci voulait, disait-il, faire voir au sultan les flammes allumées par les Mahrattes! C’était, à son avis, la meilleure manière de hâter la conclusion des traités. Cependant, comme il s’abstenait d’attaquer la capitale, les Mogols,

  1. Elles lui avaient été enlevées par un chef puissant de la famille des Guikwar, qui les possédait avant lui.
  2. Voyez History of the Mahrattas, Ly J. Grant Duff.
  3. Littéralement les deux eaux, les deux rivières. On nomme ainsi l’espace compris entre le Gange et la Djamouna, depuis Allahabad jusqu’aux collines qui traversent la partie septentrionale de l’Hindostan.