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vaux qui seraient nécessaires pour rendre parfaitement convenables les dispositions sanitaires de deux maisons contiguës, le pauvre, sans compter qu’il est à la merci de la cupidité privée, est encore plus forcément obligé de subir toutes les conséquences de la négligence publique, car, alors même que les autorités municipales ont amélioré le drainage de la voirie, ce progrès peut être pour lui comme non avenu par suite de la vicieuse construction de son logement.

Ces révélations consternèrent l’élite de la population anglaise; mais, il faut bien le dire, l’opinion publique ne s’empara point de la question avec cette ardeur qui avait mené à bonne fin des améliorations pourtant moins urgentes, La question ne fut pas l’objet d’un seul meeting, ne suscita la création d’aucun journal, ne donna lieu à aucune agitation. Ce ne fut que dans le courant de l’année 1851 que, sur les instances du comte de Shaftesbury, fut édicté l’acte des maisons de logement en commun (common lodging houses act), qui donna aux autorités locales le pouvoir de faire disparaître des logemens fréquentés par les pauvres de passage et par ceux de la paroisse les causes de maladies résultant de la négligence des mesures sanitaires. Un autre acte de la même année, concernant les habitations des classes ouvrières (labouring classes lodging houses act), autorisa les corporations municipales à contracter des emprunts pour bâtir de nouveaux logemens ou pour améliorer des maisons déjà construites. Cette dernière mesure ne paraît toutefois avoir reçu aucune application. Les corps représentatifs répugnent à augmenter le fardeau qui pèse sur leurs commettans, et quoiqu’il soit évident que les dépenses faites pour l’assainissement des villes ne tardent pas à diminuer les impôts, cependant, comme elles commencent par les augmenter, les autorités attendent l’impulsion décisive des contribuables. Le sens pratique des populations anglaises semble ici leur avoir fait défaut malgré les terribles avertissemens que ne leur ont pas épargnés les ravages du choléra. Quant à l’acte des logemens en commun, il détermina la création d’une société de bienfaisance établie en vertu de deux chartes royales, qui limitent la responsabilité de chaque actionnaire au montant de ses actions, mais qui restreignent en même temps l’éventualité de ses bénéfices à 5 pour 100 du capital dépensé. Il est à regretter que la couronne n’ait pu se montrer plus libérale à l’égard de cette association, qu’elle aurait dû de préférence encourager par ses propres subventions. Les frais des deux chartes accordées à cette entreprise si intimement liée à l’intérêt public se sont élevés à la somme exorbitante de 1,430 livres (26,750 francs). On réclame avec raison une considérable réduction de cet impôt levé sur l’article bienfaisance.