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nom nous reconnaît pour maîtres. Notre souveraineté y a été acceptée sans résistance depuis que la suppression de la compagnie privilégiée a permis à des Sénégalais de s’y établir à demeure et d’apprécier par eux-mêmes les avantages de notre domination. Les Maures Douaïches seuls ont pendant longtemps opposé à notre action l’âpre résistance de leurs mœurs nomades et de leur cupidité ; mais ralliés à nous accidentellement par une haine commune contre Al-Agui, dont ils redoutaient l’ambition politique, ils ont appris à mieux nous connaître. En novembre 1857, le chef de ces Maures, Bakar, a conclu avec l’autorité française un traité qui garantit une paix durable. Il a, le premier entre tous les chefs arabes ou berbères, accepté nos conditions sur des bases tout à fait analogues à celles que devaient souscrire quelques mois plus tard les rois des Trarzas et des Braknas. Au Bondou, le chef reconnu par nous, Boubakar-Saada, prête à toutes nos mesures un appui sincère et actif. Dans son intérêt et dans le nôtre, il combat l’influence des Anglais de la Gambie, qui envoient des agens et des cadeaux au parti contraire à son autorité, pour attirer vers leur fleuve les caravanes de ses états. En 1856, il s’est prêté de bonne grâce à nos vues sur les mines d’or de Kaniéba, dont une possession déjà ancienne lui garantissait une part de souveraineté. Notre fort de Sénoudébou, à vingt lieues de Bakel, construit sur son territoire, protège nos traitans, qui trafiquent librement sans payer de taxes.

Le navire qui stationnait à Makhana, pour protéger les communications entre Bakel et Médine, a été installé un peu plus bas, à Arondou, au confluent de la Falêmé dans le Sénégal. Sans cesser de rendre les mêmes services, il étendra son action sur l’angle compris entre les deux rivières où notre activité est appelée à se développer prochainement par l’exploitation des mines d’or du Bambouk. Dans ce dernier pays, nous comptons des alliés divers, surtout Bogoul, le chef de la ville libre de Farabana. Nos bateaux à vapeur ont franchi, dans l’automne de 1857, les passes difficiles de Débou, dans la Falêmé, et remonté jusqu’à Sansanding ; nos soldats et nos matelots sont occupés à débarrasser la rivière de roches qui entravent la navigation, et dans ce travail les habitans du pays leur prêtent un concours actif. Bientôt des forts s’élèveront, en amont de Sénoudébou, sur les territoires de Samba-Yaya et de Kaniéba, qui ont reconnu notre autorité. Enfin dans le Khasso, le plus éloigné des états qu’ait abordés jusqu’à ce jour la politique militante du gouvernement colonial, le glorieux siège de Médine et la fidélité du maître de cette ville, scellée par la communauté des dangers, des combats et des triomphes, assurent à nos desseins un loyal et ferme appui.

Ainsi, dans cette vaste région qui s’étend de l’embouchure du