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route. Sindyah s’éloigna à quelque distance, sans précipitation et comme s’il eût opéré sa retraite à loisir. Une seconde attaque le força de reculer ; cette fois encore il se retira sans éprouver de pertes considérables, et les Anglais, qui n’avaient pas remporté d’avantage décisif, regardèrent comme un succès très important d’avoir forcé Sindyah et Holkar à refuser bataille et à battre en retraite devant eux[1].

Cette même année, — 1780, — un petit corps de troupes anglaises, commandé par le capitaine W. Popham, enleva par surprise la citadelle de Gwalior, qui obéissait à Madha-Dji-Sindyah. Empêché par l’état de guerre de rejoindre le général Goddard, le capitaine Popham passa la Djamouna et se mit à la poursuite des détachemens mali- rattes qui pillaient la province d’Agra. Le rana de Gohud, à qui les Mahrattes avaient pris la citadelle de Gwalior à l’époque du démembrement de l’empire mogol, vint implorer le secours des Anglais. Ceux-ci commencèrent par emporter d’assaut la petite place forte de Lahar, appartenant à Madha-Dji-Sindyah ; puis, aidés par des espions qui parvinrent à accrocher des échelles le long des murs de la forteresse sans être aperçus par les soldats de la garnison, ils escaladèrent les remparts de Gwalior. Ce coup de main, hardiment conçu et facilement exécuté, livra aux Anglais une des plus importantes citadelles de l’Inde : on la considérait comme imprenable. Les empereurs mogols en avaient fait une prison d’état ; dans les donjons bâtis sur des rocs escarpés, ils enfermaient ceux des princes de leur famille qui leur causaient de l’ombrage. Ils y entretenaient pour leur amusement une ménagerie abondamment pourvue de lions et de tigres, dont les rugissemens ébranlaient les voûtes des cavernes creusées par la nature au milieu des rocs. Madha-Dji-Sindyah s’était plu à y amasser de l’artillerie, des armes et des provisions de toute sorte. La perte de cette forteresse lui fut sensible ; il s’en consola en y rentrant quatre ans plus tard.


III.

Pendant que des échecs réitérés venaient frapper Madha-Dji-Sindyah, Touka-Dji-Holkar prenait une part active à la guerre que les Mahrattes de Pounah soutenaient contre les Anglais dans la province du Concan avec un avantage réel ; il partageait le commandement en chef de l’armée avec le brahmane Harry-Pant-Pharkay. Peu

  1. Voyez History of the Maharittas, by J. Grant Duff. L’armée aux ordres du général Goddard ne se composait pas exclusivement d’Européens. Il avait avec lui des cipayes et des auxiliaires hindous, parmi lesquels un corps de cavalerie du Candahar (Candahar horses.)