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ses hommes périr de ce même supplice qu’on a réinauguré en 1857, attachés à la bouche du canon, sans compter vingt autres qui subirent la mort sous une autre forme<ref> Une anecdote assez curieuse se rattache au souvenir de ces exécutions : trois grenadiers du bataillon rouge, condamnés à être cannonnés, réclamèrent les pièces de droite, comme un de leurs privilèges : ils avaient effectivement la droite dans l’ordre de bataille. On tint compte de cette singulière requête. <ref>. En 1782, craignant d’être embarqués et cédant à la répugnance que l’eau noire (la mer) inspire aux brahmanes, trois régimens du Bengale se mutinèrent, parmi lesquels était un des corps-modèles de l’armée indigène, le Mathews, qui comptait vingt-six ans de glorieux services. Enfin, en 1806, dans la présidence de Madras eut lieu la fameuse révolte de Vellore, fomentée par les enfans de Tippo-Saïb. Ils étaient, au nombre de dix-huit, enfermés avec une cour nombreuse dans la forteresse de Vellore (à quatre-vingt-huit milles de Madras), sous la garde de quinze cents cipayes et d’environ quatre cents soldats européens. Le 10 juillet, à la pointe du jour, les sentinelles anglaises furent passées au fil de la baïonnette, et les casernes assiégées par les cipayes, tout à coup soulevés. Les officiers anglais étaient attendus par des assassins à la porte de leurs bungalows, et tués impitoyablement dès qu’ils se montraient. Les serviteurs des princes captifs accouraient de toutes parts, excitant les cipayes et les poussant au massacre. L’étendard de Tippo-Saïb fut hissé; puis, lorsque les révoltés se virent maîtres de la place, le pillage commença. Cinq heures pourtant ne s’étaient pas écoulées que de la ville d’Arcote, située à neuf milles de Vellore, on vit accourir un fort détachement de cavalerie, amenant quelques pièces de campagne. A huit heures, ces pièces étaient en batterie devant la porte de la forteresse. Les insurgés ne tinrent pas plus de dix minutes. Avant midi, on en avait déjà exécuté quelques centaines. La campagne battue, et quand on eut réuni tous ceux des fugitifs que ramenaient les paysans, il s’en trouva six cents environ qui restaient à juger. Presque tous se déclaraient innocens, et prétendaient s’être enfuis, non devant la répression, mais devant l’émeute elle-même. On hésita sur ce qu’on ferait d’eux, les autorités civiles et les chefs militaires ne pouvant tomber d’accord sur le meilleur parti à prendre. L’humanité finit par triompher. On n’exécuta que ceux des cipayes auxquels on avait à reprocher des actes de brigandage; les autres furent simplement rayés des contrôles de l’armée, comme incapables de rester au service de la compagnie. La plupart des officiers obtinrent même une petite pension de retraite.

La révolte de Vellore, qui coûta la vie à treize officiers européens, sans parler de quatre-vingt-deux soldats anglais tués et de quatre-vingt-onze-