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fois au contraire ce prix monte, s’exagère par une alarme sans raison, qui rend la vente rare et exigeante et l’achat impatient! La liberté du commerce intérieur a déjà apporté un grand remède au mal; la liberté du commerce extérieur complétera la guérison de ces crises qu’éprouve parfois la raison publique.

En résumé, la question du commerce extérieur des grains est capitale pour notre agriculture; elle n’est pas moins importante pour notre marine, qui, je le répète, trouve dans le transport des produits agricoles les bénéfices les plus nets, parce que ces transports lui sont le moins disputés par la concurrence des autres pavillons. L’agriculture demande instamment par la voix de ses comices, par l’organe des hommes éminens qui plaident sa cause, la liberté d’exportation comme mesure fixe, légale, nécessaire pour lui assurer des débouchés permanens. La marine se joint à elle par un besoin non moins pressant d’accroître son fret d’exportation. Le lest, la nécessité de partir de France avec des bâtimens vides, la maintiennent dans un état précaire, médiocre. En échange de cette liberté, l’agriculture renonce de grand cœur au tarif mobile pour l’importation, et demande un droit fixe, modéré, ne nuisant point au commerce. Un tel droit serait aussi pleinement satisfaisant pour les intérêts de la marine.


II.

En dépit de la stérilité qui désole nos vignobles depuis plusieurs années, nos exportations en vin ont atteint en 1857 une valeur de 160 millions, et celles en eau-de-vie une valeur de 59 millions. Cette somme totale de 219 millions n’est dépassée que par le chiffre des expéditions de tissus de soie et de laine. Le vin tient donc la seconde place dans notre commerce extérieur, mais il occupe incontestablement la première pour le fret qu’il procure à notre marine. C’est que les matières tissées ne présentent sous leur valeur énorme qu’un tonnage minime, qui du reste passe presque tout entier aux paquebots à vapeur chargés des services d’Angleterre, de Russie, d’Amérique. Soumises à une législation régulière, nos exportations en vin ne présentent pas ces variations brusques qui se manifestent pour les céréales, bien que la grappe de raisin soit plus sensible aux intempéries, à la grêle, aux maladies, que l’épi de blé. De toutes les preuves que l’on pourrait invoquer contre cette irrégularité des tarifs des céréales, il n’en est pas, à notre avis, de plus concluante que celle-ci, qui est tirée d’un cas parfaitement analogue.

Il y a déjà de longues années que la culture, le commerce et la marine tirent d’abondans subsides de ces exportations. Elles se sont