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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 20.djvu/275

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dans des questions toutes différentes où il ne s’agissait plus de discerner ce qui était juste, mais ce qui convenait le mieux dans des circonstances mobiles qu’ils connaissaient à peine, y étaient fort embarrassés ou s’y égaraient aisément, et suppléaient mal les états-généraux du royaume, tout autrement composés, et qui étaient la vraie représentation politique de la nation. Il y avait encore dans les attributions supérieures du parlement un autre péril. Dans la cour des pairs, les grands seigneurs prenaient place à côté des simples magistrats, et leur naissance, leur fortune, leurs manières, leur donnaient un ascendant presque irrésistible. On était flatté de se rencontrer avec d’aussi hauts personnages. Un sourire, un mot flatteur, une invitation, étaient des grâces dont on était fier; des grands seigneurs habiles pouvaient entraîner ainsi dans leurs intérêts, et même dans leurs querelles, des gens de robe qui connaissaient mieux leurs livres que le monde, surtout les jeunes conseillers des enquêtes, plus faciles à séduire à des prévenances intéressées. Enfin le parlement était peu favorable en général aux innovations même les plus utiles; il inclinait à la routine, au maintien superstitieux du passé. Il ne comprit donc point toujours et il contraria quelquefois les grands desseins de la royauté, au dedans et au dehors. Les gens du roi, comme on disait, c’est-à-dire le procureur-général et les avocats-généraux, qui représentaient le gouvernement, ne lui étaient pas eux-mêmes d’un grand secours, car, sortis du sein de la compagnie, ils étaient imbus de son esprit, de ses maximes, de ses préjugés même; ils n’entendaient guère mieux les affaires d’état, et dans leurs remontrances ils portaient souvent la parole avec la hardiesse de l’inexpérience.

Henri IV s’appliqua à renfermer le plus possible le parlement dans ses attributions judiciaires, et il avait bien raison, car c’était là qu’étaient sa suprême utilité, sa vertu et sa grandeur; mais, avec sa bonté accoutumée, il se contenta de peser doucement sur ces esprits très peu politiques, par exemple dans l’affaire des jésuites, que le roi rappela, malgré la vive opposition des meilleurs magistrats, par des considérations qui passaient leur portée. D’ailleurs, n’ayant pas eu le temps de commencer ses grandes entreprises militaires, il n’eut à présenter aucun édit pénible à enregistrer. Un peu plus tard, quand Richelieu reprit l’œuvre d’Henri IV, il ne rencontra dans le parlement que des obstacles. Richelieu était sorti des états-généraux, il en était un des orateurs les plus autorisés, et quoiqu’il fît partie de la chambre du clergé, il connaissait et appréciait si bien les vœux du tiers-état qu’il s’y conforma presque toujours dans sa longue administration. Il aimait ces grands conseils nationaux, parce qu’il était sûr de leur faire entendre sa politique toute nationale. En 1626, il assembla les notables, leur soumit ses plans, et les