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veut mettre l’opinion en garde contre un nouvel avortement de la combinaison qui a une première fois échoué par la faute du noble lord ? Mais nous n’insisterons pas davantage sur ces symptômes, ces indices, ces rapprochemens, et nous n’avons pas la prétention d’en tirer une conclusion téméraire et en tout cas prématurée.

Si, sur les assurances de lord Malmesbury, nous croyons volontiers aux dispositions conciliantes de l’Autriche, à plus forte raison avons-nous foi dans les intentions pacifiques du gouvernement français, malgré les insinuations contraires qui nous arrivent d’au-delà des Alpes, et que mettent en avant les partisans impatiens de l’émancipation de l’Italie par la guerre. Nous ne voulons en avoir pour garans, nous le répétons, que les actes et les paroles officielles du gouvernement de l’empereur, et la présence au ministère des affaires étrangères de M. le comte Walewski, qui a acquis des titres si légitimes à la confiance des amis éclairés d’une paix honorable. Quant aux insinuations qui arrivent d’Italie, si elles nous inquiètent sur les éventualités dont la péninsule peut être le théâtre, nous ne leur accordons pas la puissance de compromettre la France et son gouvernement. La France est unanime, nous ne craignons pas de le dire, dans ses sympathies pour la liberté et l’indépendance de l’Italie. C’est en vaiîi que de tristes rancunes ont voulu contester cette unanimité. Nous avions été contraints, il y a quelque temps, de protester contre une de ces calomnies de l’esprit de parti. L’auteur de la fameuse brochure Napoléon III et l’Italie n’avait pas craint d’écrire que la diplomatie du roi Louis-Philippe avait en 1847 soutenu dans la péninsule la pensée autrichienne ; nous nous étions contentés de répondre à cette ignorante accusation par un seul nom, celui de Rossi, qui était en 1847 le représentant le plus éminent de notre diplomatie en Italie. La réponse, nous le savons, n’était pas suffisante. Il fallait joindre à M. Rossi tous les hommes illustres qui ont éclairé ou conduit la politique de la France sous la monarchie de juillet. Un journal s’est chargé de compléter notre réfutation en citant les discours mêmes prononcés en 1847 par tous ceux qui étaient alors la gloire de la tribune française. M. Cousin, M. Thiers, M. de Montalembert, M. de Lamartine, M. Barrot, M. Guizot, sont venus tour à tour, avec une éloquence dont la France est sevrée depuis si longtemps, témoigner de la sympathie élevée et de l’appui moral que la cause italienne rencontrait dans les rangs du libéralisme français parmi ces belles perspectives de 1847, qui furent si tôt, et si malheureusement pour l’Europe entière, obscurcies et confondues par la révolution. Nous avons eu la bonne fortune de provoquer nous-mêmes cette réhabilitation éclatante en exprimant le légitime regret que la France fût privée, dans la crise actuelle, des lumières et des conseils que répandent sur la politique d’un grand pays les nobles discussions du parlement et de la presse. Ce qui achève notre satisfaction, c’est que l’écrivain qui a ressuscité les discours de nos illustres amis touche de bien près assurément à l’auteur de Napoléon III et l’Italie, c’est que les extraits reproduits par le journal ont fort l’air d’un dossier préparé pour ce fameux manifeste de la question italienne, si bien qu’il ne nous est pas défendu de croire que nous avons réussi à faire réfuter et réparer par l’auteur même l’imputation portée par la brochure contre la politique italienne du roi Louis-Philippe