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aux conséquences que pourrait entraîner une crise commerciale ou alimentaire de quelque durée. On n’a pas oublié ce que la crise alimentaire des dernières années a coûté au budget de la ville. Les grandes existences sont peu nombreuses à Paris. Sur 385,242 ménages, 218,938 habitent des logemens dont le loyer n’est pas supérieur à 150 francs. « On voit, dit à ce sujet M. Husson, combien les petites existences sont nombreuses dans la capitale. Pour alléger, en faveur des familles peu aisées, le poids des charges publiques, l’administration municipale rachète, sur les produits de son octroi, les 157,139 taxes afférentes aux loyers inférieurs à 250 francs et supérieurs à 150 francs. Ceux au-dessous de ce dernier taux se trouvant affranchis, il en résulte que 276,077 ménages ou plus des deux tiers sont regardés comme ne pouvant acquitter aucune taxe, à raison de leurs logemens d’habitation. » Assurément la population suburbaine n’est pas dans une condition plus favorable que la population de Paris; on peut même affirmer qu’elle est encore moins aisée, et que, vivant plus particulièrement de l’industrie, elle serait plus exposée à souffrir du chômage et des crises de toute nature.

Tels sont les principaux faits généraux dont il serait prudent de tenir compte dans l’examen du projet d’annexion; mais il est également des questions plus spéciales, plus circonscrites, plus locales, que cette mesure a fait naître et qui ont droit elles-mêmes à quelque faveur.


III.

De nombreux intérêts se trouvent menacés par l’annexion et ont élevé la voix. Signalons d’abord les réclamations qui se sont produites en dehors de l’enceinte.

D’après le projet soumis aux enquêtes, les nouvelles limites de la commune de Paris seraient fixées non à l’enceinte fortifiée, mais à l’extrémité de la zone défensive de 250 mètres qui l’environne. Cette large bande de terrain, déjà frappée d’une servitude militaire, deviendrait pour les employés de l’octroi une zone d’isolement dans laquelle ils pourraient exercer leur surveillance sans sortir de la juridiction parisienne. La propriété qui avoisine les fortifications dans un périmètre de huit lieues et demie a contesté les raisons pratiques sur lesquelles l’administration a fondé cette partie du projet; nous n’irons pas aussi loin. Ces raisons nous paraissent fort sérieuses: l’intérêt fiscal de l’octroi semble exiger cette ceinture d’évolution autour des nouvelles murailles de l’enceinte; mais aussi c’est à bon droit, selon nous, que la propriété atteinte présente de nouveau la requête qu’elle n’a cessé d’adresser à l’administration depuis quelque temps, et demande une indemnité. Le conseil d’état aurait, dit-on, repoussé la prétention par ses arrêts : cela est vrai; mais de