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217 millions. L’Algérie occupe le millième rang dans la hiérarchie des relations commerciales de la France, et même le septième pour les seules exportations; mais elle n’est qu’au douzième pour les importations, la France lui ayant envoyé en 1857 pour 125 millions de marchandises contre 34 , nouveau témoignage de l’insuffisance de la production locale. Son mouvement commercial égale, à 20 millions près, celui de toutes les autres colonies françaises réunies. La navigation, cabotage non compris, a fidèlement traduit ses progrès et a compté 4,267 voyages en 1857, avec un tonnage effectif de 557,023 tonneaux, chiffres respectables, quoique bien éloignés encore de ceux des colonies anglaises.

Le commerce, aussi bien que la production, appelle comme son auxiliaire le plus puissant un vaste système de travaux publics : l’état seul en pouvant entreprendre ou autoriser l’exécution, négocians et cultivateurs lui adressent incessamment leurs suppliques. Les routes sont leur premier et plus grave intérêt. Avant l’arrivée des Français, toute voiture étant inconnue des Arabes, les chemins n’étaient que des sentiers pour des chevaux et des chameaux. En trente ans, et avec une dépense d’une vingtaine de millions, il a été ouvert environ 4,500 kilomètres de routes autres que les simples chemins vicinaux. Un cinquième au plus de cette étendue est en bon état d’entretien, le reste est à peu près impraticable pendant l’hiver, et souvent même la circulation est officiellement interdite au roulage. Aussi les Arabes sont-ils presque les seuls à percevoir pendant cette saison le prix des transports que les voituriers européens doivent surhausser pendant l’été pour compenser trois ou quatre mois de chômage. On a constaté qu’en 1853 le commerce avait dû payer en un an, pour les seuls transports de grains entre Orléansville et Tenez, 300,000 francs de plus que si la route eût été terminée. Le dommage est le même partout ailleurs, sur toutes les routes, en les prenant dans leur étendue totale, car il n’y en a pas une seule entièrement achevée : les crédits suffisent même rarement pour l’entretien des travaux, que ravagent et emportent les pluies torrentielles de l’hiver. Enfin les travaux neufs se réduisent à si peu de chose qu’il ne faudrait pas moins de cent quarante années, avec les allocations ordinaires, pour mener à fin les routes du territoire militaire.

Le réseau général de la viabilité algérienne, très nettement indiqué par la nature, se divise en deux grands systèmes : les lignes perpendiculaires au littoral, les lignes parallèles. A tous les mouillages de la côte correspond dans l’intérieur quelque petite ou grande ville qui reçoit dans ses murs, comme un entrepôt, tous les produits d’un bassin commercial plus ou moins étendu, et les dirige sur la