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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 22.djvu/481

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le camp parfaitement à l’abri. Des munitions et des vivres furent aussi versés au Bucéphale et à la garnison. L’arrivée de la Boussole parut changer les dispositions des naturels. La fusillade s’éteignit peu à peu, et le soir même on crut voir, sur les sommets hantés les jours précédens, s’agiter des tapas blanches. Bien qu’à cette distance le vêtement des femmes qui viennent visiter les guerriers aux postes les plus avancés pût tromper le regard, on donna l’ordre de ne tirer qu’à bon escient.

Le 24, un grand nombre de canaques se montrèrent sur les crêtes qui mènent aux baies d’Appetony et d’Hanatéténa. Tous portaient des fardeaux comme s’ils déménageaient et abandonnaient complètement les deux vallées. A dix heures, ils firent de leur position la plus voisine une décharge qui dura assez longtemps pour paraître générale, et, à partir de ce moment, on n’en revit plus un seul. Le chef de la mission française pensant alors, d’après sa connaissance du pays, que le peuple devait désirer la paix, s’offrit pour s’informer de ses intentions. Une baleinière de la Boussole, commandée par M. Desnoyers, enseigne de vaisseau, conduisit le missionnaire à la baie d’Appetony. quelques heures plus tard, il en ramenait Maheono, sa femme et deux autres chefs. Tous portalent des tapas blanches qu’ils agitaient en approchant du navire. Les commandans se réunirent à bord de la Boussole, et la paix fut accordée aux canaques à diverses conditions dont voici les principales : abandon complet des deux vallées de Vaïtahu et d’Anamiaï, ainsi que des versans et mornes qui y conduisent et les commandent; ces terres avec tout ce qui s’y trouvait, cases, arbres, fruits, animaux divers, etc., devenaient notre propriété. Iotété était expulsé des vallées, mais on consentait à le laisser vivre dans la baie d’Appetony. Maheono, proclamé de nouveau chef suprême de Tahuata, devait, au nom de tous, faire acte de soumission complète au commandant français. On fixa l’heure de midi pour recevoir, le jour suivant, dans les formes et coutumes du pays, l’hommage de ce chef, qui put retourner avec son escorte porter aux canaques les conditions de la paix.

Le lendemain, à l’heure dite, Maheono, toujours accompagné de sa femme et suivi de plusieurs indigènes, se présenta au commandant Laferrière. Un chef inférieur lui remit une palme verte que nouait une tapa blanche. Maheono vint la déposer aux pieds du commandant, puis il lui prit la main, et, se prosternant à plusieurs reprises, il se déclara son vassal. M. Laferrière, après avoir accepté la palme symbolique, dit aux canaques qu’il recevait au nom du roi des Français leurs sermens de soumission et d’obéissance, leur accordait la paix aux conditions indiquées, et leur promit que nous se-