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l’Autriche la mission inattendue de réaliser elle-même cette portion si importante du programme impérial. Le Moniteur n’est pas plus heureux dans les exemples qu’il allègue à l’appui de sa thèse que dans ses réminiscences. Peut-on prendre au sérieux la comparaison qu’il établit entre la Hollande figurant par le Luxembourg dans la confédération germanique et l’Autriche entrant avec la Vénétie dans la confédération italienne ? Nous ne savons en vérité ce qui a valu aux Pays-Bas l’honneur d’un rapprochement si surprenant. La Hollande est un petit état, l’Autriche est un puissant empire ; la Hollande n’a jamais prétendu à l’influence en Allemagne, l’Autriche a exercé sur l’Italie une domination séculaire ; la maison de Nassau n’a pas de branches établies dans les états de la confédération germanique, la maison de Habsbourg-Lorraine a peuplé de ses agnats et de ses alliances les trônes de l’Italie. La Hollande a été dans la société moderne le berceau de la liberté civile et religieuse, l’Autriche a été l’adversaire inflexible de cette liberté. Si l’on veut à toute force expliquer par une analogie quelconque le rôle que prendrait l’Autriche dans une confédération italienne, il ne faut pas aller bien loin : on trouvera dans l’Autriche elle-même et dans ses relations avec la confédération germanique la seule comparaison applicable. L’Autriche ne figure dans la confédération germanique que pour une partie de ses états. Le roi de Hongrie et de Bohême n’est point un confédéré allemand ; avec ses possessions allemandes, l’empereur d’Autriche serait inférieur au roi de Prusse : ce sont ses possessions extra-allemandes, sa position prépondérante dans l’Allemagne catholique, la clientèle que cette double cause d’ascendant lui crée parmi les gouvernemens des états secondaires menacés par les tendances de la Prusse et les aspirations unitaires de leurs sujets, qui ont donné à l’Autriche son influence dominante au sein de la confédération germanique. Les mêmes causes agiraient avec bien plus de force encore en Italie, si la confédération italienne recevait dans son sein en même temps que l’Autriche les archiducs restaurés.

La confédération, il faut bien le dire, et cela ressort de l’article du Moniteur sérieusement médité, voilà la véritable pierre d’achoppement des préliminaires de Villafranca, la cause des prétentions contradictoires et absolues du cabinet de Vienne d’une part, et de l’autre des populations de l’Italie centrale. Que l’on veuille bien y réfléchir : cette idée d’une confédération, que la France patrone, n’est encore qu’à l’état de théorie ; le caractère qu’elle aura dans l’avenir et l’influence qu’elle exercera sur les destinées de l’Italie dépendent uniquement des élémens qu’on y fera entrer dès l’origine. La confédération sera une combinaison bonne ou mauvaise, sûre ou périlleuse, italienne ou autrichienne, suivant les principes d’après lesquels elle sera réalisée. Avant d’enchaîner l’avenir, nous comprenons que des deux parts l’on hésite et l’on veuille s’entourer de précautions. Par là s’explique cette condition sine qua non posée par l’empereur d’Autriche sur le retour des archiducs. Sans doute, l’empereur d’Autriche est inspiré par un sentiment d’honneur, lorsqu’il demande la restauration des princes ses parens. Ces princes, obéissant à l’esprit de famille, ont mieux aimé se brouiller avec leurs sujets et perdre le pouvoir que de renier et de combattre le chef de leur maison : il est naturel que l’empereur d’Autriche tienne à récompen-