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accompli toute la tache dont elle avait d’abord paru se charger, et lui ait laissé encore beaucoup à faire. C’est dans les épreuves qu’elle devra traverser pour arriver à son équilibre définitif qu’elle apprendra à se gouverner : elle tâtonnera laborieusement, elle fera de nombreux essais peut-être avant de trouver la forme qu’elle cherche ; mais c’est à cette école de la liberté et du développement indépendant et naturel que s’organisent et grandissent les peuples. Leurs erreurs mêmes dans cette voie et les obstacles auxquels ils se heurtent leur sont plus profitables que l’appui d’une protection étrangère. Il n’est pas jusqu’à la condition la plus déplorée de la paix de Villafranca, celle qui a laissé la Vénétie au pouvoir de l’Autriche, qui ne puisse exercer une influence heureuse sur l’Italie. Cette condition laisse en effet subsister la question de nationalité, et maintiendra par conséquent cet esprit d’union, cet oubli des dissentimens de parti, cette discipline que fortifie une grande aspiration patriotique commune à tous, que les Italiens ont montrés dans la crise actuelle, et qu’ils auront besoin de conserver longtemps encore, d’abord pour traverser l’état provisoire où il semble que l’on se propose de les laisser quelque temps, et ensuite pour s’organiser.

Le provisoire, le provisoire systématiquement prolongé peut-être, tel est l’écueil qui attend les populations de l’Italie centrale. En effet, ce n’est point à Zurich, on l’a deviné depuis longtemps, que se décidera la question des duchés. La paix, on y compte, sera conclue à Zurich avant la fin de ce mois. C’est dire que le traité de Zurich sera fort succinct, qu’il se bornera à régulariser l’état de paix et à consacrer ce louable parti-pris, auquel la France et L’Autriche se sont arrêtées, de ne plus recourir ni l’une ni l’autre aux tentatives belliqueuses en Italie. La signature du traité de Zurich mûrira-t-elle cependant le congrès ? Nous ne le croyons guère. Le roi de Sardaigne, en répondant à la députation toscane qu’il ferait valoir auprès des puissances les droits que le vœu de la Toscane lui conférait, a lui-même assigné en quelque sorte la durée du provisoire, et en a indiqué le terme dans la réunion d’un congrès. Nous serons d’accord avec le Moniteur pour conseiller aux Toscans de modérer leurs espérances dans la réunion prochaine d’un congrès et leur confiance dans les résolutions qu’un pareil tribunal diplomatique pourrait, dans les circonstances actuelles, prendre à leur égard. Les congrès, de leur naturel, ne sont ni inventeurs ni novateurs : ils ne sont guère institués que pour ratifier des faits accomplis et des résultats politiques qui paraissent bien établis. Les faits accomplis dans l’Italie centrale sont trop jeunes encore pour que le cénacle des grandes puissances leur pardonne à l’heure qu’il est les coups qu’ils portent aux maximes et aux vieux arrangemens diplomatiques de l’Europe. L’Angleterre seule peut-être en ce moment serait disposée à donner satisfaction aux vœux des Italiens. La première préoccupation des gouvernemens provisoires de l’Italie centrale doit donc être de préparer leurs ressources et de concerter leur action de telle sorte qu’ils puissent traverser régulièrement un long provisoire. Il serait téméraire à nous d’aller plus avant dans cet avis général, et de leur indiquer les mesures pratiques qu’ils ont à prendre. Sans entrer dans le détail de ces mesures, il nous semble que, dans la législation, dans