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les sauriens marins étaient fort nombreux ; actuellement il n’existe plus qu’un seul lézard marin, c’est l’amblyrhinchus cristatus, fort commun dans les îles de l’archipel des Galapagos, et qui atteint quelquefois la longueur de 1m 22.

L’amblyrhinchus cristatus est donc le reste dégénéré de la faune erpétologique des anciens âges. Trouvant encore dans la mer du sud près d’un archipel les conditions qui étaient, des milliers d’années auparavant, largement répandues sur le globe, il s’y est conservé. Le lama, cantonné aujourd’hui dans les Andes, a laissé ses ossemens fossiles dans les grottes du Brésil, où il a jadis habité. Le crocodile, le paresseux, l’hippopotame, le rhinocéros semblent être de même les derniers représentans de la faune des époques antérieures. Parmi les oiseaux, on en peut dire autant du condor et de l’étrange famille des casoars particulière à l’Océanie occidentale et appartenant à un ensemble de types qui se maintiennent encore dans cette partie du monde. L’aptéryx, cet oiseau bizarre, sans ailes ni queue, qui ressemble à un hérisson et qui cherche sa nourriture la nuit, paraît à notre époque un animal isolé dans la création ; mais l’étude des ossemens fossiles de la Nouvelle-Zélande, qu’habite l’aptéryx, nous montre qu’il faisait partie d’une catégorie de gros oiseaux primitivement fort répandue dans la Polynésie. Le dinornis, ou moa des Kanaks, a laissé dans des marais quelques débris de sa dépouille, et rien ne s’oppose à ce qu’on admette avec les insulaires que cet oiseau monstrueux vivait encore dans l’île à une date peu éloignée[1].

L’autruche, oiseau non moins singulier que les struthions de la Nouvelle-Zélande, qui semble un intermédiaire entre les quadrupèdes et les volatiles, et ne se rencontre sous deux formes différentes que dans l’Afrique et l’Amérique méridionale, peut être regardée comme un des derniers descendans d’une famille de grands oiseaux marcheurs habitant nos régions à l’époque tertiaire, ainsi que l’a démontré la présence du tibia du gastornis parisiensis aux environs de Paris. Celui-ci était, d’après les observations de M. Owen, un oiseau plus lourd que l’autruche. L’espèce en a disparu depuis la période miocène ; mais l’outarde, de plus en plus rare dans notre France, est le représentant abâtardi de cette bizarre création ornithologique.

Là où nous remarquons que les mêmes types ont persisté depuis des époques très éloignées, que les espèces n’ont subi que des modifications peu profondes, on doit admettre que les conditions biologiques ont à peine changé. M. Lund a trouvé dans les cavernes du Brésil, mêlés aux fossiles d’espèces éteintes, les

  1. Ses ossemens ont été découverts près d’ossemens humains.