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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 novembre 1859.

Le nœud des affaires européennes se serre de jour en jour, et nous avons à coup sûr le droit d’espérer que le moment approche où il sera délié ou tranché. L’anxiété nerveuse qu’entretient la situation politique actuelle est trop irritante pour qu’on puisse songer à en faire longtemps encore le régime normal de l’Europe. Nous répéterons notre profession de foi : nous repoussons les alarmes vaines, et nous avons trop le sentiment des vraies difficultés qui nous assiègent pour vouloir les aggraver de gaieté de cœur par des peintures exagérées. Bien loin de chercher à augmenter les embarras que l’état de l’Europe suscite au gouvernement de notre pays comme aux autres gouvernemens, nous pensons au contraire l’aider à conjurer ces embarras en exprimant franchement la perplexité impatiente qu’ils nous inspirent. Dans la complication des affaires humaines, il arrive toujours en effet une heure où l’enchevêtrement des détails crée une telle confusion de sentimens et d’idées que, pour dominer et conduire une situation, il faut sortir de la poussière des faits, s’élever au-dessus d’eux, et chercher dans quelque intérêt général, dans quelque principe supérieur, la clarté et la force nécessaires pour franchir les fossés et les broussailles qui barrent le chemin à la politique terre à terre. Nous sommes dans une de ces heures critiques où, pour trouver et assurer leur route, les peuples et les gouvernemens demandent de la lumière et de l’air. Et en le disant que faisons-nous, si ce n’est de hâter le moment où doivent se prendre les résolutions décisives et éclatantes qui peuvent rendre l’équilibre à la raison publique et la sécurité aux intérêts déconcertés ?

Nous sommes sûrs en tout cas de n’être point dupes d’une bizarrerie de notre tempérament. Nous ne sommes pas les seuls à ressentir un pareil malaise ; pour le prouver, nous n’aurions pas besoin d’invoquer des témoignages français, lors même que l’on pourrait regarder la presse parmi nous comme un interprète exact et complet des sentimens publics. Nous ne chercherons pas non plus les symptômes de ce malaise dans les publications de