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DE
L'ALLIANCE ANGLAISE



Pitt avait-il raison de déclarer à la France une guerre qui aurait pu être immortelle, puisqu’elle ne devait finir qu’à la condition que la France y perdît son gouvernement ? Fox avait-il tort d’exhorter obstinément son pays à rester neutre dans les querelles du continent, qui ne touchaient point essentiellement l’Angleterre, à respecter dans la France en révolution la liberté d’être à son gré une puissance démocratique ou despotique ? Les écrivains soigneux de ranimer parmi nous les ressentimens et les ombrages qui pourraient, les événemens aidant, amener une rupture entre les deux peuples habitans des rivages de la Manche, savent-ils bien qu’ils travaillent à résoudre la question en faveur de Pitt, et à réhabiliter le génie des coalitions ? C’est au fond la politique de Fox qui aujourd’hui domine en Angleterre. Le principe de non-intervention, que notre grand ennemi Burke dénonçait comme un crime, est en honneur de l’autre côté du détroit. Des cabinets peu d’accord sur tout le reste y recommandent à leur pays la neutralité toutes les fois qu’elle est possible. Cette politique d’abstention, juste et louable quand elle a pour principe le respect de l’indépendance des nations, irréprochable lorsqu’aucune nécessité de salut ou d’honneur n’ordonne d’y renoncer, est encore fortifiée et encouragée, presque jusqu’à l’abandon de certains intérêts d’orgueil ou de dignité, par les nouvelles doctrines sociales que les merveilles de quarante ans de civilisation pacifique ont fait naître dans la patrie de la vapeur et des chemins de fer. Et c’est le moment