être connu par lui-même, son existence a besoin d’être démontrée, qu’elle ne peut l’être que par son effet, qu’en un mot « notre entendement est conduit par les choses sensibles à la connaissance divine, c’est-à-dire à connaître de Dieu qu’il est. »
En effet, l’argument de la nécessité d’un premier moteur, qui tient la plus grande place dans la scolastique peut à la rigueur être rattaché à l’expérience, et saint Thomas, qui y insiste encore plus que sur l’argument tiré des fins du gouvernement du monde, s’est, de son aveu, classé parmi ceux qui n’admettent en théologie naturelle que des preuves a posteriori. Je sais bien que parmi celles qu’il admet, on en pourrait désigner qui n’ont point ce caractère, et qui même offrent une certaine analogie avec les preuves a priori du cartésianisme; mais il ne s’en est pas aperçu, il doit être jugé par ses intentions : l’inconséquence d’Aristote l’a gagné à son insu, et Arnauld a eu raison de l’opposer à Descartes.
Toute la scolastique n’est pas dans saint Thomas, et l’on pourrait, en cette grave matière, lui trouver des adversaires; mais au moment où la scolastique s’écroule, Bacon en France et Descartes en Angleterre s’élèvent à la fois contre Aristote, l’un pour fonder une méthode plus empirique que la sienne, l’autre pour-établir une autre méthode d’observation; l’un pour raffermir par l’induction mieux traitée la science a posteriori, l’autre pour donner dans la conscience une base expérimentale à la science a priori ; l’un pour montrer Dieu au sommet des phénomènes, l’autre pour le montrer à la source des idées, tous deux d’accord cependant pour chasser la considération des causes finales de la connaissance de la nature.
Dans la proscription dont il les frappe, Bacon certainement exagère la sévérité. Elles n’ont point fait à la physique tout le mal qu’il leur impute. Elles mériteraient d’ailleurs toutes ses accusations qu’elles ne devraient pas disparaître à son commandement, et la raison persisterait à reconnaître une harmonie intelligente dans l’ordre de l’univers. Moins le cosmos semble la perfection réalisée, plus les combinaisons qui en assurent la durée et la stabilité attestent un profond dessein. Il faut nier l’ordre ou concevoir une intelligence cause de l’ordre. Bacon lui-même a confessé que la Providence peut être connue par ses ouvrages, et il n’a pas découragé ses compatriotes, si fidèles à sa gloire, du soin de chercher dans la nature des marques d’une suprême sagesse. Bien au contraire, ils se sont adonnés avec une persistance infatigable à cette investigation. C’est le sujet d’une multitude de bons livres anglais. Dans aucun pays, il ne s’est publié autant de traités de théologie naturelle où lut faite une plus grande part à la contemplation de l’ordre universel. La téléologie a été longtemps en Angleterre la base de la théologie.
Cette démonstration appuyée sur les sciences naturelles devait