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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/733

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et plus anciennes compagnies[1] : « La loi a entendu laisser à l’industrie des chemins de fer toute liberté d’action nécessaire à toute industrie….. C’est donc au libre arbitre de l’industrie elle-même qu’est confié l’établissement des tarifs dans les limites qui sont fixées par les maxima. » L’orateur et l’écrivain sont également dans l’erreur : aucune industrie n’est moins libre que l’industrie des chemins de fer, qui a été à dessein laissée dans une dépendance complète de l’administration, et il importe de se rendre un compte très exact de cette dépendance.

On sait que l’état a employé deux modes d’établissement des chemins de fer en France : il les a construits ou il les a fait construire par des compagnies. Il serait inutile de rappeler cette origine, si l’on n’y trouvait l’occasion de réduire à sa juste valeur un argument maintes fois présenté dans la question qui fait le sujet de cette étude, argument qui consiste à supposer que les compagnies sont d’autant plus engagées vis-à-vis du public, que, comme contribuable, le public a supporté la plus grande partie des frais occasionnés par la construction des voies ferrées. C’est placer mal à propos le débat sur un terrain étranger, car les 9,000 kilomètres établis en France au 31 décembre 1859, pour la somme énorme de 4 milliards et demi, n’ont coûté au trésor ou aux localités intéressées que 740 millions de francs environ, tant en travaux qu’en subventions pécuniaires, et le capital complémentaire de 3 milliards 760 millions de francs a été entièrement fourni par les actionnaires ou les créanciers des compagnies.

Quel que soit le mode suivant lequel ait été établi un chemin de fer, l’exploitation est confiée à une compagnie concessionnaire, c’est-à-dire ayant le privilège, compensé par certaines charges, d’y opérer les transports. La seule de ces charges qu’on doive considérer ici est celle qui a formellement enlevé à cette compagnie la libre disposition des tarifs. Pour indemniser le concessionnaire des dépenses de diverse nature qu’il s’engage à acquitter, l’acte de concession lui accorde l’autorisation de percevoir, pendant la durée du contrat formé entre lui et le gouvernement, des prix de transport dont le maximum est déterminé par un tarif aussi détaillé qu’un document semblable peut l’être. De là une première sorte de tarif, dit maximum légal, qui est généralement appliqué au transport des personnes, sauf dans quelques cas exceptionnels, par exemple lorsqu’il s’agit d’un de ces détournemens dont un type saillant est certainement le trajet de Bordeaux à Nantes en passant par Tours, soit encore pour le service de la banlieue des grandes villes, où les conditions de distance ne permettent pas, ainsi qu’on peut le voir à

  1. Les Tarifs de chemins de fer et l’Intérêt public.