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les lois. On a, il est vrai, récemment tenté de percer les ténèbres de la conception ; mais les observations sont encore trop imparfaites pour qu’on soit assuré des résultats. Un médecin, M. Lhéritier, a proposé des vues ingénieuses, fondées sur une étude attentive d’un assez grand nombre défaits. Suivant ce physiologiste, il faut, pour saisir les lois de la transmission, distinguer les organes en trois classes, à savoir : les organes locomoteurs, ceux de la nutrition, et l’appareil nerveux central. Celui-ci se subdivise à son tour en deux parties : l’une antérieure, qui comprend le cerveau et le cordon antérieur de la moelle épinière, l’autre postérieure, embrassant le cervelet et le cordon postérieur de la moelle. Ces deux subdivisions des organes de la troisième classe se lient respectivement aux deux premières ; l’appareil locomoteur est dans une dépendance directe de la partie postérieure du système nerveux central, et l’appareil nutritif dans la dépendance de la partie antérieure de ce même système.

C’est sur cette connexion que reposent, selon M. Lhéritier, les lois de la ressemblance, c’est-à-dire le mode suivant lequel tel ou tel ascendant transmet à sa progéniture telle ou telle série distincte d’organes. Y a-t-il équilibre entre parens de la même variété, l’un des deux transmet indifféremment l’une ou l’autre des deux séries organiques. Si les parens sont de variétés différentes, le père donne toujours la série postérieure, c’est-à-dire le cervelet et les organes locomoteurs ; la mère, au contraire, donne constamment la série antérieure, c’est-à-dire les sens et le système nutritif. Ces lois, le médecin français les déduit des faits reconnus dans le croisement des animaux, et il croit les retrouver dans l’homme. Avertis des principes posés par M. Lhéritier, c’est au public, aux physiologistes, de les vérifier ou de les infirmer. Je n’ai point d’ailleurs à traiter ici de l’hérédité physiologique proprement dite ; ce qui me préoccupe, c’est la question des dégénérescences, et par conséquent la transmission des maladies. Le docteur P. Lucas remarque qu’une maladie peut être transmise sous trois formes, autrement dit, à trois degrés différens de développement : d’abord comme simple aptitude idiosyncrasique, c’est-à-dire comme une disposition organique à laquelle il ne faut que des circonstances favorables pour se traduire en une maladie caractérisée ; puis comme état rudimentaire, c’est-à-dire sous une forme latente, en germe. Ici la disposition maladive tend à un développement déterminé. Le germe morbide renferme en lui une force spontanée qui donnera naissance au mal, si elle n’est combattue. Enfin la maladie même peut passer des parens aux enfans, avec son cortège propre de formes, de symptômes et de lésions. Et dans ce dernier cas on doit dire que la dégénérescence est fatale ; dans le second, on peut encore en éviter, en arrêter le