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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/99

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développement. Dans le premier, elle ne se produira que si l’on s’entoure des circonstances propres à la faire naître.

Qu’on se reporte maintenant aux quatre grandes classes de causes qui amènent la dégénérescence, qu’on les envisage dans leur transmission héréditaire, et l’on reconnaîtra quel vaste réseau d’actions morbides tendent à nous faire dévier de l’organisme normal. Telle cause physique ou physico-morale devient pour le descendant de l’individu qui y a été soumis une cause morale ou congéniale. L’influence des lieux et l’insalubrité du régime ont-elles altéré et déjà dégradé la constitution d’un individu, l’enfant auquel il donne le jour en subira l’influence, même transporté en d’autres climats et soumis à un genre de vie différent. Des idiots naissent ainsi de parens qui ont longtemps vécu dans des cantons où règne le crétinisme. Nombre de fous et d’imbéciles ont eu pour pères des ivrognes. Un père et une mère atteints, bien qu’à un faible degré, d’une de ces maladies qui épuisent l’organisme et dévastent l’économie, auront pour enfans des êtres frappés d’un mal plus profond ou d’une infirmité plus incurable. Ces tristes vérités font mieux comprendre le danger des alliances entre personnes de constitutions maladives analogues, ou même de tempéramens identiques, car les tempéramens sont comme les formes de gouvernement, ils succombent par l’exagération de leur principe, et cependant ils sont fatalement entraînés à cette exagération. Chaque tempérament porte donc en soi le germe de sa destruction, et si deux tempéramens semblables se trouvent associés, ces germes s’ajoutent chez l’enfant.

Les dangers des unions entre personnes du même sang et de même famille ont été signalés par plusieurs médecins, MM. Morel, Burdel et F. Devay. Les statistiques en mains, ces observateurs montrent combien d’êtres dégénérés naissent d’unions contractées entre parens, entre personnes atteintes d’un même principe morbifique. Il est bon de rappeler ici leurs éloquentes plaintes ; puissent-elles monter jusqu’à ceux qui oublient que dans les mariages la vraie convenance est l’harmonie des constitutions, et la fortune la plus sûre la santé des enfans à naître !

La dégénérescence trouve ses bornes dans son excès même. L’individu arrivé au dernier terme de l’abâtardissement, comme certains crétins, ou affecté de la plus énorme, de la plus complète des monstruosités, est frappé de stérilité. Au bout d’un certain nombre de générations, les familles de crétineux, de phthisiques, d’aliénés, d’idiots, s’éteignent, et selon que la dégénérescence est plus ou moins profonde, il faut plus ou moins de temps pour que l’humanité soit purgée de ceux qui n’y propagent que la misère physique et morale. Ces familles atteintes de dégénérescence sont comme les races sauvages et dégradées auxquelles la Providence