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bien portans eussent certainement fait leurs cocons, ils contractent trop souvent des affections qui s’ajoutent à la première, se développent avec une rapidité foudroyante, et détruisent parfois en deux ou trois jours, à la veille du coconnage, des chambrées de la plus belle apparence.

Ce sont les maladies intercurrentes qui donnent le coup de massue aux éducations ébranlées par la pébrine ; ce n’est point ailleurs qu’il faut chercher la cause immédiate de ces désastres imprévus et soudains dont je n’ai vu que trop d’exemples. Écarter ces maladies doit être l’objet des préoccupations constantes de tout sériciculteur. Pour atteindre ce but, une hygiène bien entendue sera presque toujours suffisante. Les règles en ont été posées depuis bien longtemps dans une foule d’ouvrages, et la commission académique des vers à soie les a rappelées dans tous ses écrits. Moi-même, je me suis efforcé de les justifier de nouveau en m’appuyant aussi bien sur les malheurs généraux du moment que sur les exceptions si frappantes, si bien faites pour encourager, que j’ai pu constater au milieu même de quelques localités des plus rudement atteintes[1]. Et pourtant, jusque dans les classes les plus éclairées de la société, ces règles ne sont ni généralement acceptées, ni même comprises par l’immense majorité des éducateurs. Partout, dans mes deux missions, j’ai eu à lutter contre les préjugés et la routine. Si quelque esprit d’élite admettait des doctrines plus justes, presque toujours je le voyais reculer devant les plus simples conséquences pratiques des principes qu’il acceptait en théorie.

Au risque de prêcher encore dans le désert, je voudrais rappeler une fois de plus aux sériciculteurs les principes fondamentaux de toute éducation de vers à soie. À vrai dire, tous ces principes peuvent se ramener à un seul, celui d’un bon aérage. Le ver à soie n’est autre chose qu’une chenille créée pour vivre au grand air sur un arbre. Donnez-lui donc cet air qu’elle est destinée à respirer si largement, donnez-le-lui en abondance, et parfaitement pur. N’entassez pas vos vers à soie comme vous le faites ; délitez plus souvent ; écartez de vos ateliers ces foyers imparfaits, ces brasiers méphitiques, qui versent dans l’atmosphère tous les produits de la combustion, et empoisonnent à la fois les vers et ceux qui les soignent ; remplacez-les par des poêles ou des calorifères ; distribuez avec intelligence dans le bas et dans le haut de vos magnaneries les ouvertures nécessaires pour qu’un courant d’air lent, mais incessant, balaie et emporte au dehors les émanations de toute sorte produites par ces milliers d’êtres vivans, par leurs déjections, par

  1. Recherches sur les maladies actuelles du ver à soie.