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haute température. Ainsi il serait possible, en la chauffant lentement, de la décomposer sans produire une destruction violente. L’expérience en a été faite : le soufre a fondu d’abord et s’est volatilisé ; le charbon, resté seul avec le nitrate de potasse, s’est emparé peu à peu d’une partie de l’oxygène qu’il contient, et en forçant le feu, on a liquéfié sans explosion un mélange de salpêtre et de potasse carbonatée. Voilà certes un résultat inattendu pour quiconque sait avec quelle facilité ce dangereux produit s’enflamme et éclate, soit à l’air, soit même sous l’eau, car la poudre renferme en elle-même tous les élémens de sa combustion, et elle n’emprunte rien à l’atmosphère. C’est sur cette propriété que repose le principe des mines sous-marines dont tout le monde a entendu parler, et c’est un fait que chacun peut aisément vérifier ; en ayant le soin toutefois d’éviter que la poudre soit en contact direct avec l’eau : dès qu’elle est mouillée, elle ne prend plus, et se détériore promptement. Mais si de telles propriétés sont remarquables, celle qui frappe surtout au premier abord, c’est la rapidité extrême de l’inflammation de la poudre, rapidité si grande qu’elle est devenue proverbiale. Il s’en faut cependant que la combustion soit, comme elle le paraît, instantanée : elle exige un temps appréciable, qui a pu être mesuré dans quelques circonstances. On sait qu’il varie avec les caractères physiques de cet agent et avec les conditions où il est placé. Des grains de dimension ordinaire, rangés en file de manière à se toucher, ne brûleraient pas avec une vitesse de plus de 25 centimètres par seconde, et encore à la condition d’être bien secs, car la moindre humidité augmenterait beaucoup cette durée. Si la poudre était enfermée dans un tube et tant soit peu tassée, la combustion serait bien plus prompte, sans pourtant être jamais ni instantanée ni même totale, quelle que soit la longueur des armes. Ce dernier fait est facile à vérifier : il suffit de tirer un coup de fusil ou de pistolet au-dessus d’un drap blanc, sur lequel on recueillera toujours un certain nombre de grains intacts, sans compter ceux qui n’ont achevé de brûler qu’après être sortis du tube. On le pressent tout de suite, la puissance des projectiles doit augmenter avec la longueur des armes, qui favorise une combustion plus complète. L’expérience confirme cette prévision, pourvu que les armes n’atteignent pas des dimensions exagérées, où le frottement des projectiles se développerait d’une manière fâcheuse.

La vitesse de la combustion de la poudre est intéressante à déterminer, surtout dans les espaces fermés, car de là dépend l’épaisseur qu’il convient de donner aux parois des armes à feu. La force d’expansion des gaz est immense, les machines à vapeur nous l’apprennent chaque jour, et cependant rien de ce qui s’y passe ne saurait