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gulièrement la direction des courans de l’atmosphère. L’obstacle que leur opposent ces murailles naturelles amène fréquemment une déviation du vent, et celui-ci se réfléchit dans une direction opposée avec un redoublement d’énergie. L’agitation de l’atmosphère dans les régions montagneuses est un phénomène en quelque sorte normal. Le soir et la nuit, il s’établit des sommets dans la vallée un courant d’air descendant, parce que les parties basses se refroidissent plus vite que les parties élevées ; le jour, le courant change de sens et devient ascendant. C’est, comme on voit, quelque chose d’analogue à la brise qui règne sur les côtes. Le jour celle-ci vient de la mer, le soir elle souffle du rivage. De même que la brise du soir, le courant descendant des montagnes a plus de durée que le courant contraire. Ainsi l’atmosphère, qui a ses marées, présente aussi ses alternances diurnes de vents.

Chaque soir, l’abaissement de température, en amenant une plus grande condensation de la vapeur, fait descendre les nuages, et ceux-ci passent en s’abaissant par une série de formes et d’apparences qui varient à tout instant l’aspect du paysage. Les nuages sont des Protées dont il est difficile de décrire toutes les métamorphoses : les météorologistes ont cependant proposé une classification qui embrasse les apparences principales. Ils distinguent les cirrus, composés de filamens déliés, réunis comme les soies d’un pinceau ou mêlés comme les cheveux de notre tête ; les cumulus, amas hémisphériques qui prennent à l’horizon l’aspect de montagnes neigeuses ; les stratus, bandes horizontales qui tapissent souvent le firmament au coucher du soleil ; les cirro-cumulus, petits nuages arrondis, ordinairement distribués dans le ciel comme les moutons d’un troupeau et qui lui donnent une apparence pommelée. Chacune de ces différentes familles de nuages a sa région moyenne où on la voit le plus habituellement suspendue. Les forts amas de vapeur ne s’élèvent guère au-delà de 2 500 mètres, mais les cirrus atteignent de bien plus grandes hauteurs, et on les observe, ainsi que les cirro-cumulus, à des altitudes de 12 000 mètres.

Les amas de vapeur ne tendent pas seulement à modifier l’état de l’atmosphère, ils jouent un grand rôle dans les phénomènes optiques que présentent les hautes régions. L’absorption des rayons lumineux qui traversent les couches de l’air dépend du plus ou moins grand degré d’épaisseur de celles-ci. De légères variations à cet égard déterminent des décompositions différentes du spectre solaire ; en même temps que les couleurs varient, les objets s’offrent à nous plus ou moins éclairés. Apercevons-nous un de ces objets dont la dimension nous soit connue, une maison, un homme, un animal, alors que l’atmosphère des montagnes est d’une extrême