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se communique que lentement à l’atmosphère qu’il arrache à son immobilité, et ce n’est qu’à la longue que la quantité de vapeur apportée peut déterminer le point de saturation et amener la pluie. Au contraire la disposition des montagnes oppose-t-elle une barrière aux vents, le mélange des deux masses d’air s’opère rapidement, et au bout de quelques instans la nouvelle quantité de vapeur suffit à la production de la pluie. Ce même air, qui dans la vallée circule librement, vient-il se heurter contre une chaîne, le moindre déplacement de la masse atmosphérique produira la formation d’ondées, et les inégalités de température dues aux accidens de terrain engendreront sans cesse des chocs entre des masses d’air inégalement chargées de vapeur.

Les luttes des diverses parties de l’atmosphère entre elles sont donc les révolutions qui agitent ces régions élevées, où de loin tout a l’apparence de l’immobilité et du repos. Après une nuit claire et sereine, les cimes se refroidissent par le rayonnement ; autour d’elles, la vapeur se condense, puis, à mesure que le soleil s’élève à l’horizon, un courant d’air ascendant s’établit, des vents horizontaux se produisent, et ces petits nuages, chassés peu à peu des pics qu’ils enveloppaient, vont se dissoudre dans l’atmosphère, tandis que de nouvelles vapeurs prennent leur place. Du fond de la vallée, l’œil ne saurait apercevoir ce transport continuel qu’accompagne fréquemment un vent assez vif. Il semble que les nuages demeurent immobiles, bien que leur alignement dénote la direction du vent ; mais si l’on gravit la montagne, on ne tarde pas à constater que ces couronnes nuageuses sont, comme bien d’autres couronnes, sans cesse exposées à des agitations.

Ainsi la vapeur d’eau, qui donne à l’atmosphère sa qualité respirable et sa force d’entretien pour la vie, est aussi la source principale de ses convulsions. Les couches d’air sont poussées à différentes hauteurs par des courans en sens contraire, qui tiennent à l’inégalité de la répartition de la chaleur, et qui se combattent toutes les fois qu’un mouvement violent imprimé à la masse atmosphérique n’assure pas la prédominance exclusive de l’un d’entre eux. Tandis que, dans les régions supérieures par exemple, un vent du sud pousse les nuages vers le nord avec une prodigieuse rapidité, d’autres nuages placés plus bas s’avancent lentement au midi. Toutefois le vent de la région supérieure finit par l’emporter ; mais il ne domine au fond des vallées qu’après des engagemens partiels où il n’a pas toujours de prime abord l’avantage, qu’à la suite de rafales, de tourmentes et de tourbillons qui portent quelquefois la désolation et la ruine.

La disposition des chaînes de montagnes modifie d’ailleurs sin-