L’individualisme a trop pénétré l’église hollandaise pour qu’il en soit ainsi, et il en est un peu de cet abaissement des barrières dogmatiques dans son sein comme de celui que l’économie politique réclame des gouvernemens de nos jours : on craint toujours, en les supprimant, de tarir l’industrie, la production, l’esprit d’entreprise, et les résultats viennent toujours aussi démontrer combien ces craintes sont peu fondées. Le fait est que, depuis le commencement du siècle, la science et la vie religieuses ont suivi en Hollande une marche ascendante, que tout concourt à activer encore, et l’on peut ajouter libertate régnante. La liberté est une grande et belle chose, et l’on aime à la voir déployer ainsi sa puissance fécondante dans un pays petit par l’étendue, et dont le caractère positif semblait devoir diriger les esprits partout ailleurs que vers les régions transcendantes. Ce qui fait oublier bientôt ce que les discussions religieuses offrent trop souvent d’amer et d’étroit, c’est d’abord que la prolongation de pareils débats leur ôte précisément cette amertume et cette étroitesse qu’elles ont fréquemment à l’origine, c’est ensuite que l’homme ne se montre nulle part plus fidèle aux tendances les plus nobles de son être que lorsqu’il consacre son cœur et sa vie à la poursuite désintéressée de l’invisible. C’est en vivant de cette manière qu’il met en évidence sa destinée immortelle. Il est donc fait pour autre chose que pour ramper dans la boue des intérêts vulgaires. Quand on étudie l’homme dans son histoire au lieu de l’étudier dans les abstractions de la vieille psychologie, on retire de ses agitations à la surface de la terre toute autre chose que du découragement. Ce qui effraie tant le vulgaire, c’est-à-dire l’inanité si fréquente des efforts de la raison pour atteindre la vérité, est précisément ce qui rassure le penseur, car cette inanité même ne fait que rendre plus instructive et plus étonnante la répétition constante, acharnée, de ces efforts. Quant à nous, qui avons foi dans
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