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Aux extraits sirupeux et sucrés des jus de raisin ont succédé de véritables vins plus ou moins alcooliques, tantôt acerbes, tantôt doux, suivant sans doute la variété du cépage et les progrès de la fermentation spontanée. On trouve dans Pline l’indication de deux vins d’Albe, l’un doux, dulce, l’autre acerbe, austerum. Deux variétés correspondantes se rencontraient dans le vin fameux de Falerne. C’étaient bien certainement des vins graduellement améliorés par une lente fermentation que les anciens considéraient comme les meilleurs : on ne devait boire le falerne, suivant Athénée et Galien, qu’au bout de dix ans, et il ne conservait pas plus de dix années au-delà de ce terme ses excellentes qualités. Les vins usuels pouvaient être bus dès la septième année, tandis que l’on attendait vingt ans avant de boire le vin d’Albe, et que l’on gardait vingt-cinq ans le vin de Sorrente. Cicéron, dans un repas chez Damasippe, fit l’éloge d’un vin de Falerne de quarante ans en disant qu’il portait bien son âge, bene œtatem fert. Un vin datant d’un siècle a été célébré par Horace sous la qualification de vin de cent feuilles. Au temps des Romains, on conservait le vin très vieux de Falerne dans de grands vases (amphorœ) en argile cuite, vitrifiée à l’intérieur, dont l’ouverture était close avec un tampon de plâtre recouvert d’un enduit résineux. Un passage de Virgile prouve que les Romains ont aussi fait usage des vins mousseux :

: ……Ille impiger hausit
: Spumantem pateram……..

Ils ne dédaignaient pas les vins légers qui ne se pouvaient garder plus d’une année, comme la plupart des vins actuels de la Toscane. Les vignobles de l’ancienne Italie offraient d’ailleurs un assez grand nombre de crus variés produisant des vins en renom : sur des collines, autour du Mondragone, au pied duquel coulait l’Iris (aujourd’hui le Garigliano), on récoltait les raisins d’où l’on savait obtenir le falerne et le massique. Les vignobles situés aux environs de Gaëte fournissaient les vins de Fondi et d’Amiela. Cependant à la suite des progrès du luxe s’introduisirent dans Rome les vins généreux et parfumés de Lesbos, de Chio, de Cos, d’Éphèse et de Clazomène. Déjà aussi l’on distinguait les deux qualités différentes que l’on peut obtenir soit par le simple écrasage des grappes et l’écoulement spontané du jus, soit par la trituration plus énergique du foulage et l’action de la presse. La première qualité représentait le jus pur du fruit, la deuxième, ou vin de pressurage, contenait en proportions notables les principes acerbes-astringens et colorés extraits par le contact plus prolongé du liquide avec les pépins, les pellicules, etc. Ces