Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 28.djvu/255

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toujours est celle de l’unification. Il faudrait prendre garde de ne pas confondre l’unification avec la centralisation, car nous serions entraînés à établir une forme de gouvernement qui violerait toutes les traditions du pays qui serait en contradiction avec tous nos goûts et tous nos instincts. L’unité dans la politique générale extérieure et intérieure dans l’organisation de l’armée est essentielle pour la sûreté de l’état et pour la garantie de l’indépendance de la nation. Je n’ai pas non plus la pensée de mettre en question ces principes de droit qui sont inscrits dans la loi fondamentale, et qui régissent également tout le pays, tous les citoyens, toutes les provinces nouvelles ou anciennes. L’unification, ou plutôt la centralisation, qui serait dangereuse est celle qui embrasserait l’administration proprement dite, les institutions de bienfaisance, l’instruction publique à ses divers degrés.

Qu’on y songe bien : un grand centre administratif suppose déjà conduit à créer un grand centre de population et de richesse, en un mot une grande capitale. Il suffit de voir la plus légère idée de ce qu’est l’Italie, pour être convaincu qu’il ne saurait s’élever parmi nous une grande capitale qu’au détriment de cette vie locale qui depuis des siècles s’est créé une multitude de foyers à la surface ; de notre sol. La grande capitale et la grande centralisation administrative, nécessairement associées, auraient nécessairement pour conséquence de faire disparaître à la longue ces différences si multiples d’esprits ; d’habitudes de vie et de travail qui s’étendent à toutes les classes sociales, et qui ont en Italie, un caractère si distinct, si tranché. Un système politique qui serait fondé sur la destruction de ces différences qui aurait pour objet de jeter dans un même moule les divers peuples de la péninsule, ce système ne ferait pas seulement perdre à la nation des forces dès longtemps acquises, utiles au progrès intellectuel et matériel des populations ; il obligerait ces forces à se transformer et à prendre un cours tout nouveau dans un milieu moins favorable.

Une grande centralisation administrative aurait pour nous particulièrement d’autres fâcheuses conséquences. Ce système ne peut exister qu’en créant une classe très nombreuse de fonctionnaires publics vivant nécessairement aux frais de l’état et ne portant le plus souvent dans le maniement des affaires que des idées étroites ou plutôt des règles qui dispensent des idées, une routine lente, aride et imparfaitement éclairée. Nul ne doute assurément que tous ceux qui se laissent attirer par les emplois publics ne fussent infiniment plus utiles à la grandeur et aux libertés de leur pays en se créant dans le commerce, l’industrie, les sciences ou les lettres une existence indépendante, digne de citoyens libres. Le grand nombre des fonctionnaires publics est, on le sait, la plaie des budgets et absorbe des ressources qui seraient plus utiles ailleurs, qu’on pourrait même se dispenser de prélever par l’impôt sur les populations. Je pense qu’une des plus grandes découvertes que pût faire aujourd’hui un homme d’état serait de simplifier les rouages administratifs, de rendre plus facile et plus économique ; la perception