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des discussions du sénat est devenu un usage. Nous nous félicitons de ce nouveau moyen d’exprimer l’opinion publique introduit dans le sénat, non pas malgré la constitution de 1852, mais en dehors de cette constitution. À Dieu ne plaise que nous voulions discréditer ce parlementarisme imprévu en y applaudissant trop ! nous avons encore de quoi être très modestes dans nos espérances, en les comparant avec nos souvenirs. Nous aimons cependant à penser que nos anciennes mœurs politiques, nos anciennes habitudes de discussion et de publicité ne sont pas entièrement effacées, qu’elles reviennent peu à peu par une sorte de penchant instinctif ; nous aimons tout ce qui peut nous faire croire à l’influence invisible et puissante des institutions que nous avons eues pendant trente ans, et que nous avons peut-être plus abjurées qu’oubliées.


III

J’ai examiné les moyens qu’avait le sénat, selon la constitution de 1852, de connaître et d’exprimer l’opinion publique, et j’ai noté en passant les changemens que l’usage a introduits. Il me reste à faire le même examen pour le corps législatif.

La part de pouvoir que la constitution a faite au corps législatif est beaucoup plus petite que celle qu’elle a faite au sénat, et le corps législatif n’a pas à craindre, comme le sénat, s’il usait de son pouvoir, de tomber dans la révolution ; mais, quoique ses pouvoirs soient restreints, le corps législatif a cependant un avantage sur le sénat, si nous considérons la communication et les liens entre les corps de l’état et le peuple comme la cause principale de la force des assemblées délibérantes. Le corps législatif émane du peuple, et comme le mandat législatif ne dure que six ans, il y a tous les six ans des élections qui, à défaut de toute autre action politique, avertissent le pays de l’existence du corps législatif. Il tient au pays par son origine ; mais les autres liens entre le pays et lui sont faibles et indirects. Ainsi le corps législatif ne reçoit pas de pétitions ; de plus, quoique les séances soient publiques, la publicité est incomplète et tardive. L’on sait que, d’après l’article 42 de la constitution, le compte-rendu des séances du corps législatif par les journaux ou par tout autre moyen de publication ne consistera que dans la reproduction du procès-verbal dressé à l’issue de la séance par les soins du président du corps législatif. » C’est ici, disons-le franchement, le nœud de la question pour le corps législatif. Si l’article 42 continue à être exécuté littéralement, si l’usage n’y introduit pas quelque amélioration, comme au sénat, la communication entre le corps législatif