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tournent tout en avançant. On peut observer le même phénomène en petit dans une de ces colonnes de poussière qui l’été balaient souvent les chemins. On les voit tourner légèrement et en même temps progresser, quelquefois vite, quelquefois avec une extrême lenteur. Un intéressant passage des Observations sur les Tempêtes tournantes, publiées par ordre de l’amirauté anglaise, donne une idée exacte de ces ouragans[1]. « Un caractère remarquable de ces ouragans est l’accroissement de leur violence dans le voisinage du centre du tourbillon. Ceux qui ont acheté chèrement leur expérience en traversant le centre d’un de ces ouragans parlent du bouleversement de la mer comme de quelque chose d’horrible ; s’élevant en montagnes pyramidales de tous les côtés de l’horizon, elle retombe sur le navire, et déferle sur lui comme sur un rocher. D’un autre côté, il y a des exemples d’un ouragan qui se calme brusquement au centre même du tourbillon, les nuages se dispersent pendant quelques courts momens trompeurs ; mais bientôt, comme s’il acquérait une nouvelle force par un instant de calme, le vent revient en décuplant sa furie. On peut ajouter que peu de navires ont passé par une semblable épreuve sans y laisser leurs mâts ou leur gouvernail, ou même sans éprouver de plus grands malheurs encore, et que par conséquent, quelle que soit la perte de temps, de travail et de chemin que cela doive coûter, tout homme dans son bon sens doit s’éloigner du centre d’un ouragan. »

Tous ceux qui se sont attachés à l’étude de ces dangereuses tempêtes, qui balaient souvent des espaces immenses, ont observé que le mouvement de rotation s’opère toujours dans le même sens à l’intérieur du tourbillon aérien. Dans notre hémisphère, il a lieu en sens contraire à la marche du soleil, c’est-à-dire de droite à gauche, pour un observateur qui serait placé au centre. Dans l’hémisphère boréal, le mouvement se fait de gauche à droite. En parlant de la rotation normale des vents, j’ai fait voir que le vent tourne comme l’aiguille d’une horloge ; dans le tourbillon des tempêtes, il tourne au contraire dans le sens opposé. Cette observation est extrêmement précieuse, car elle permet au navigateur qui croit être entré dans la zone d’une cyclone de gouverner de façon à échapper en ne courant que les moindres dangers. Les tempêtes tournantes ont pour théâtre habituel l’Océan-Atlantique, où elles suivent de préférence la grande courbe tracée par le courant marin nommé gulf stream, qui verse les eaux chaudes des tropiques dans les mers du nord ; elles se font sentir aussi sur l’Océan-Indien et dans les mers de la Chine, où on les nomme typhons. Les points de départ habituels de ces trombes

  1. Nous empruntons la traduction de M. Hommey, lieutenant de vaisseau de la marine française.