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l’époque du passage du centre de gravité d’un hémisphère à l’autre, et non avec celle où ce centre de gravité serait le plus éloigné du centre de la terre. Or le passage est naturellement déterminé par la fonte des glaces de l’un des deux hémisphères avant le moment où la masse de celles qui sont dans l’hémisphère opposé a pu acquérir son maximum de volume. Nous avons souvent l’occasion d’observer que le moment des débâcles ne coïncide point avec le moment des plus grandes chaleurs de l’année ; il n’y a donc pas de raison pour que la débâcle d’un pôle coïncide avec le moment de la plus grande chaleur de l’hémisphère correspondant. Ces variations d’état calorifique sont liées, d’après ce qu’on vient de voir, aux changemens de position du périhélie[1] et de la durée respective des saisons. Il y a onze mille quatre-vingt-quatorze ans, la somme des heures de nuit de notre hémisphère avait atteint son maximum et commençait à diminuer. Ce serait donc plus tard seulement qu’aurait eu lieu le déluge. M. Adhémar admet que cet événement ne date que de quatre mille ans, mais il s’arrête ici à une époque visiblement trop rapprochée. Les civilisations égyptienne et chinoise remontent au moins à trois ou quatre mille ans avant notre ère, et c’est de près de six mille ans qu’il faut reculer pour arriver à une date probable. Ce serait donc environ cinq mille quatre-vingt-quatorze ans après que notre hémisphère avait commencé à se réchauffer que la catastrophe aurait eu lieu, date à laquelle s’arrêtait déjà Cuvier. Cette période a été nécessaire pour déterminer le ramollissement, puis la débâcle des glaces boréales. Le phénomène inverse s’était produit dans la période précédente de dix mille cinq cents ans, et des déluges alternatifs du nord au sud et du sud au nord ont dû marquer de même les âges antérieurs.


II

C’est maintenant à la géologie de nous dire si une semblable théorie s’accorde avec l’étude des couches du globe. Après s’être laissé conduire par des considérations purement mathématiques, l’auteur s’est ensuite appuyé sur des argumens que lui a fournis l’état de l’écorce terrestre ; des savans sont venus à son aide. Faisons connaître le résultat de leurs recherches.

L’avantage de la théorie de M. Adhémar serait de nous fournir un moyen d’établir d’une manière plus rigoureuse la chronologie des événemens, car cette chronologie est la pierre d’achoppement

  1. Le périhélie est la même chose que le périgée, c’est-à-dire le point de la plus petite distance de la terre ou d’une autre planète au soleil ; le mot périhélie s’emploie quand on veut rappeler que ce n’est pas le soleil, mais la terre qui se meut.