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Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 31.djvu/31

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ce mois a porté ici la confirmation officielle de l’affreuse catastrophe dont nous avions déjà la triste certitude.

« Il n’y a pas de paroles qui puissent rendre le sentiment d’un tel malheur. Il faut courber la tête, se taire et se soumettre,

« L’Europe saura, non moins que la France, quelle perte elle a faite. Cela sera compris partout, et j’en ai déjà trouvé la preuve dans le langage plein de conviction des membres du corps diplomatique.

« P.-S., 24 juillet.

« M. le comte de Nesselrode sort de chez moi.

« Il est venu, de la part de l’empereur, m’exprimer en son nom toute la part que sa majesté impériale avait prise au malheur qui a frappé la famille royale et la France.

« L’empereur, m’a dit M. de Nesselrode, a été vivement affecté de cette terrible nouvelle ; il a pris immédiatement le deuil et a fait contremander un bal qui devait avoir lieu à l’occasion de la fête de son altesse impériale Mme la grande-duchesse Olga. »


« Le même au même.

« Saint-Pétersbourg, 31 juillet 1842.

« Monsieur,

« L’impression produite par le fatal événement du 13 a été aussi profonde que ma dernière lettre vous le faisait pressentir.

« Vous savez, monsieur, que je continue à être exclu de tous rapports avec la société ; je n’ai donc pas constaté moi-même ce que j’apprends cependant d’une manière certaine, combien chacun apprécie l’étendue de la perte qu’ont faite la France et l’Europe.

« Ces jours de deuil sont aussi des jours de justice et de vérité. Le nom du roi était dans toutes les bouches, le souhait de sa conservation dans tous les cœurs.

« On n’hésitait plus à reconnaître hautement que de sa sagesse dépendait depuis douze ans la paix de l’Europe ; on n’hésitait plus à faire à notre pays la large part qu’il occupe dans les destinées du monde ; on applaudissait aux efforts de ceux dont le courage et le dévouement viennent en aide au roi dans l’œuvre qu’il accomplit.

« J’ai vivement regretté, monsieur, qu’une situation qui me maintient forcément isolé m’empêchât d’exercer sur les opinions, sur les sentimens, sur la direction des idées, aucune espèce de contrôle ou d’influence.

« M. de Nesselrode, lors de la visite dont j’ai eu l’honneur de vous rendre compte et où il me porta au nom de l’empereur de fort convenables paroles, ne sortit pas des généralités, et ne me laissa