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Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 31.djvu/341

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Une commission composée de personnages éminens dans le conseil d’état, les forêts et les ponts et chaussées, a été chargée d’examiner le projet de transférer au corps des ponts et chaussées seul la police tout entière de la pêche. Elle a fait sur cette question un rapport très développé ; mais il paraît que ses instructions lui prescrivaient de s’occuper beaucoup des mérites respectifs des deux corps savans engagés dans le débat, et fort peu du poisson. Elle a conclu, avec des ménagemens qu’on ne saurait trop louer, si l’on fait abstraction des intérêts de la pêche, au maintien de l’organisation actuelle, en y ajoutant « l’établissement d’une commission mixte permanente composée de membres de l’administration des ponts et chaussées, de membres de l’administration des forêts et de membres de l’Institut. » — « Cette commission, dit-elle, délibérerait sur les questions qui diviseraient les deux administrations ; elle empêcherait les dissentimens de dégénérer en conflits, et ferait leur part légitime aux intérêts opposés des deux services[1]. » Suivant une mode qui tend à dégénérer en usage dans les commissions, cette conclusion a été prise à la majorité d’une seule voix ; mais on ne saurait méconnaître combien une réunion dont faisaient partie le directeur-général, des forêts et le directeur-général des ponts et chaussées a fait avancer la question d’organisation en déclarant avec cette fermeté de conviction que deux services qui concourent à une œuvre commune ont des intérêts opposés ! Mon respect pour les corps savans ne m’eût jamais permis d’être aussi sincère.

J’ai hâte de sortir des questions de personnes dans lesquelles s’est attardée la commission, et, pour en finir sur ce point, je n’ajouterai qu’un mot : « L’administration des forêts, a-t-on dit, ne prétend concourir avec le corps des ponts et chaussées que dans une science modeste et expérimentale qui rentre dans le cercle de ses études et ne requiert pas les hautes applications du calcul différentiel. » Si la direction générale des forêts s’imagine que tous les ingénieurs se souviennent d’avoir appris à l’École polytechnique le calcul différentiel et intégral, elle est dans une grande erreur ; mais, pour que l’argument eût une portée, il faudrait qu’il résultât de la connaissance de cette forme de calcul un obstacle à se connaître aux conditions de l’empoissonnement des eaux courantes, et l’obstacle n’existe pas même pour de grandes choses qui rentreraient bien plus directement dans le service forestier. C’est un ingénieur des ponts et chaussées, Brémontier, qui le premier a fixé par le boisement les dunes mouvantes du golfe de Gascogne, et depuis 1789

  1. Rapport du 25 novembre 1859 à M. le ministre des finances et à M. le ministre de l’agriculture, du commerce et des travaux publics.