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d’abstention volontaire en 1848, suivi, avec une attention scrupuleuse jusqu’au moment de sa retraite définitive en 1852, tout le détail de nos relations extérieures. Seuls, les ministres qui tour à tour ont profité de ses services et sont demeurés pour lui pleins d’estime et d’amitié peuvent dire aujourd’hui, avec une autorité suffisante, ce qu’ils ont trouvé d’aide dans l’étendue de ses connaissances si variées, de sa mémoire si prodigieuse, dans la calme sérénité de son jugement si droit et de sa modération d’esprit plus infaillible encore.

Les événemens de la politique intérieure n’ont pas été d’ailleurs moins que les circonstances du dehors l’objet constant des préoccupations de M. de Viel-Castel. Comme s’il avait eu le pressentiment de la tâche qu’il devait plus tard entreprendre, avec cette régularité méthodique qui est l’un des traits de son caractère, il n’a jamais cessé de prendre note des faits les plus importans venus à sa connaissance, et de consigner pour lui-même l’impression qu’il en avait ressentie. Les deux volumes qui sont l’objet de notre étude ne contiendraient pas un exposé aussi complet de la politique intérieure de la restauration en 1814, si une foule de pièces inconnues du public n’avaient jadis passé sous les yeux de l’ancien directeur politique du ministère des affaires étrangères ; il ne nous raconterait pas aujourd’hui avec tant de détails nouveaux et curieux les négociations suivies à Vienne avant le retour de l’empereur de l’île d’Elbe, si, pour les besoins de son service, il n’avait autrefois feuilleté, à plus d’une reprise, la correspondance particulière du prince de Talleyrand avec le roi Louis XVIII. De même, à le voir instruit si à fond des circonstances les plus secrètes de notre politique extérieure, nous devinons qu’il a dû, pour les obtenir, puiser à des sources également sûres, et nous le soupçonnons, tant ses renseignemens sont exacts, d’avoir eu communication d’autres mémoires aussi curieux et plus circonstanciés que ceux de M. de Talleyrand, fruits d’une vie non moins longue et non moins remplie, mémoires consciencieux et véridiques par excellence, dont le public soupçonne tout au plus par ouï-dire l’imposante autorité, et qui, prêtés par lambeaux d’une main avare, ne sont encore connus que d’un trop petit nombre d’heureux privilégiés.

Néanmoins la supériorité des informations, la connaissance approfondie des rapports qui relient entre elles les affaires du dedans et celles du dehors, né forment pas à beaucoup près le seul mérite de cette nouvelle Histoire de la Restauration, il y faut joindre le don non moins heureux d’une rare et naturelle impartialité. Cette impartialité n’a rien de factice, elle n’est pas un effet de l’art ; on n’y sent point l’effort de ces auteurs attentifs à ne se trahir jamais eux-