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le Norzagaray, le Jacaréo, l’Amphitrite, la Didon, etc. Une fois la réunion de ses forces navales opérée, l’amiral Charner s’occupa de faire débarquer tous les hommes qui devaient composer l’armée de terre[1].

Malgré les accablantes chaleurs dont souffraient surtout les compagnies de marins, moins habitués à la marche que les troupes de terre, les opérations de débarquement et de campement furent conduites avec une telle rapidité, qu’à partir du 16 février l’armée entière, arrivée à Saigon, se trouvait prête à être lancée contre les Annamites. L’amiral Charner n’attendait plus que les soldats qui devaient arriver avec la Garonne pour commencer l’attaque. Le 23 février, toutes les troupes purent être portées sur le lieu du prochain combat. Le lendemain dimanche 24, on commençait l’action en attaquant les forts avancés des Annamites ; mais avant d’entrer dans le récit du combat il est nécessaire de donner quelques indications sur le champ de bataille. Qu’on se figure une vaste plaine ; dans cette plaine, trois principaux cours d’eau, le fleuve de Saigon courant du nord au sud, et les arroyos chinois et de l’Avalanche, se dirigeant tous les deux de l’ouest à l’est et se jetant, au nord et au sud de Saigon, dans le fleuve du même nom. Voilà donc un espace enfermé de trois côtés par des cours d’eau, et dont le quatrième côté seul, le côté ouest, reste libre. C’est ce quatrième côté qui est ou plutôt qui était occupé par les lignes annamites. Au moment de l’attaque, les Français étaient maîtres d’une partie du quadrilatère. À l’est, là où coule le fleuve de Saigon, mouillait la flotte ; au sud, le long de l’arroyo chinois et à une faible distance de ce cours d’eau se trouvaient quatre positions fortifiées appelées la pagode Barbé (du nom du capitaine qui l’avait fortifiée et qui y avait été assassiné par les Annamites), les pagodes des Mares, des Clochetons et du Caï-haï. Dans l’arroyo chinois même, il y avait deux torchas armées, l’Amphitrite et le Jacaréo. Au nord, les Français commandaient sur une longueur de 3 kilomètres la rivé droite de l’arroyo de l’Avalanche ; mais plus loin et sur la rive gauche se trouvaient les Annamites. Le gros de l’armée de ces derniers occupait les lignes formant le côté ouest du quadrilatère. Ces lignes, venant du nord et du sud, aboutissaient à un point central, au fort de Ki-oa. Pour plus de clarté, j’essaie de résumer en quelques mots cette description. Le champ de bataille est un carré imparfait. Les Français sont maîtres à l’est et au sud ; les Annamites se trouvent à l’Ouest et en partie au nord. Leurs principaux ouvrages forment une longue ligne qui s’étend du nord au sud, et dont les positions les plus avancées se rapprochent de l’arroyo chinois et des pagodes des Clochetons et du Caï-haï. La grande plaine dans laquelle se trouvent ces pagodes, et qui s’étend jusqu’au-delà des lignes annamites, est appelée la plaine des

  1. Cette armée, commandée en sous-ordre par le général de Vassoigne, se composait de 1,200 hommes d’infanterie de marine (lieutenant-colonel Fabre) ; — 1,000 marins-fusiliers (capitaine de vaisseau de Lapelin) ; — 600 chasseurs (chef de bataillon Comte) ; — 200 artilleurs (chef d’escadron Crouza) ; — 100 sapeurs du génie (chef de bataillon Alizet) ; — 70 cavaliers, — tagals de Manille, chasseurs d’Afrique, spahis (capitaine Hocquard) ; — 200 Espagnols (colonel Palanca y Guttures). — Les forces navales furent placées sous le commandement du contre-amiral Page, à bord de la Renommée, qui restait en rade de Saigon, mais qui devait, au moment de l’attaque, remonter le fleuve et bombarder les forts au nord des lignes annamites.