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Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 33.djvu/699

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normale ? Une organisation de crédit qui a de pareils résultats est-elle parfaite ? Ces 4 ou 500 millions de numéraire représentés par 7 ou 800 millions de billets n’ont-ils pas une mission impossible à remplir, puisque seuls ils sont obligés de suffire à toute la circulation des valeurs commerciales, industrielles et, financières de la France ?

Tout a été changé depuis dix ans dans la constitution et les élémens de la fortune publique, et les agens de cette fortune non-seulement ne sont pas devenus plus nombreux, non-seulement n’ont pas été organisés pour cette situation nouvelle, mais ils ont disséminé leur action et leurs forces dans tous les sens, en vue d’obtenir des résultats et de donner des satisfactions pour lesquelles ils n’avaient pas été créés. Je veux dire entre autres choses que la circulation de 7 ou 800 millions de signes monétaires dont nous jouissons a été employée, pour la plus grande partie à venir, en aide à l’état, aux détenteurs de rentes et de valeurs financières, et qu’il n’est resté à la disposition du commerce et de l’industrie, c’est-à-dire des travailleurs, qu’on nous permette le mot, que 3 ou 400 millions, somme tout à fait inférieure à leurs besoins, et qui va le devenir bien davantage par suite de la situation de lutte où les place la réforme douanière vis-à-vis de rivaux dès longtemps en possession du nerf de la guerre. Les établissemens formés pour combler cette lacune, n’étant pas des instrumens de crédit, ne pouvant pas augmenter le capital flottant du pays, sont incapables de remédier à cet état de choses et de combler le déficit produit par toutes les causes que nous avons énoncées.

Ces établissemens de crédit, les modifications et les extensions qui leur ont été accordées ont donné satisfaction à des idées qui en provoquaient depuis longtemps l’avènement, mais la base sur laquelle repose tout cet édifice assez hétérogène ne s’est pas élargie proportionnellement à ce qu’elle est obligée de supporter. L’augmentation du capital de la Banque de France, autour de laquelle pivotent toutes ces institutions, n’a pas pourvu à l’organisation véritable du crédit, car la Banque supporte tout le poids des innovations qui ont été faites, et elle ne peut étendre sa circulation de billets au-delà d’une certaine limite. En créant le crédit mobilier, le crédit foncier et ses embranchemens, la société commerciale et industrielle, en étendant les attributions du comptoir d’escompte de Paris, on a fait naître simplement de nouveaux élémens de clientèle et de nouveaux cliens à la Banque de France au détriment des anciens[1]. Cette surabondance de clientèle est un des grands embarras de la Banque,

  1. Et d’ailleurs, si ces établissemens de crédit sont vraiment utiles, pourquoi la France est-elle privée des bienfaits qu’ils ne peuvent répandre que sur la ville de Paris ?