une certaine ostentation. La session qui vient de finir à Madrid un peu d’épuisement, et aussi par un brusque décret de suspension des cortès, laisse cette question singulièrement indécise. Ce n’est pas que la majorité ait manqué au gouvernement toutes les fois que la politique ministérielle a été mise en jeu, et que les oppositions modérées ou progressistes ont engagé le combat ; mais le danger est la justement, dans ces discussions multipliées, toujours renaissantes, qui se dénouent chaque fois par un vote favorable, et qui ne mettent pas moins en lumière les faiblesses de la politique ministérielle, ses tergiversations incessantes et son ambiguïté dans le maniement des intérêts extérieurs et intérieurs de la Péninsule.
Une des conditions du cabinet actuel de Madrid, on le sait bien, c’est de vivre d’un système de transaction perpétuelle, travaillant sans cesse à rallier les fractions éparses des anciens partis, modérés et progressistes, pour les faire marcher ensemble. Depuis trois ans qu’il est au pouvoir, le général O’Donnell a mis sans nul doute à résoudre ce problème un talent de tacticien qu’on ne lui connaissait pas. Il fait face avec intrépidité aux oppositions, il manœuvre habilement entre les partis, et quand il est à bout de raisons, il argumente volontiers en homme décidé à garder la position. Pour tout dire, seul il a fait vivre le ministère, qui, sans lui, ne serait point entré ces jours-ci dans la quatrième année de son existence. La situation qu’il s’était faite cependant le mettait en face d’une alternative qu’il ne pouvait éviter : s’il essayait de marcher et d’agir, il risquait de froisser les uns ou les autres de ses amis, les progressistes ou les modérés, et s’il ne faisait rien, s’il se réfugiait dans l’équilibre de l’inaction, il mettait un peu tout le monde contre lui. Il est à craindre qu’après avoir épuisé toutes les chances de ce double système, il n’en soit aujourd’hui au point où il n’a d’autre garantie que la faiblesse et l’incohérence de ses adversaires. Sous ce rapport, et à n’observer que la politique intérieure, la session qui vient de finir ne laisse point d’être instructive ; elle montre le chemin qui a été fait, ce qu’est devenue cette idée de l’union libérale qui représentait naguère comme le dernier mot des combinaisons possibles. Le ministère en effet a essayé un peu de tous les systèmes, il en a éprouvé alternativement les dangers, et au bout du compte, mis en présence d’une interpellation délicate, il a fini par clore brusquement les cortès sans qu’aucun des projets qu’il avait présentés aux chambres ait pu être voté. C’est là le résumé le plus clair d’une session de six mois.
Le ministère avait proposé une loi destinée à réorganiser l’administration provinciale ; mais à peine cette loi était-elle livrée à la discussion, qu’elle rencontrait la plus vive opposition de la part des progressistes ralliés au cabinet. L’opposition grandissait à mesure que le débat se prolongeait, et il s’ensuivait bientôt une véritable crise ministérielle. On échappait à la crise ; seulement la loi est restée en suspens, et n’a pu être votée par les deux chambres. Une législation nouvelle sur la presse avait également été présentée pour remplacer une loi qui crée un régime des plus durs, et contre laquelle était dirigé en partie le mouvement d’opinion d’où naissait, il y a trois ans, le ministère actuel. Qu’est-il arrivé ? Après trois ans, l’ancienne loi est toujours en vigueur, et la législation nouvelle a subi à peine un commencement de discussion dans le congrès. Lorsque le cabinet du général