Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 34.djvu/423

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec plus de douceur. Si le Berri a eu parmi ses administrateurs un membre de la famille de Sully, la Haute-Guienne a pu s’honorer de compter parmi les siens un descendant de Colbert. Le nouveau président écrivait moins que l’autre, mais il calma souvent par son caractère conciliant des froissemens de personnes que son prédécesseur aurait peut-être irrités, ce qui ne l’empêchait pas de montrer à l’occasion une fermeté inébranlable.

La retraite de Necker en 1781 parut mettre un moment en question, dans la Haute-Guienne comme dans le Berri, l’existence de l’assemblée provinciale ; mais elle avait eu en moins de deux années le temps de jeter de profondes racines. Cette année 1781 fut même celle où la commission intermédiaire et son infatigable agent, M. de Richeprey, accomplirent le plus de travaux. L’assemblée avait ordonné une sorte d’enquête sur l’état agricole de la généralité ; M. de Richeprey fit à lui seul cette immense recherche, dont le résultat pratique fut imprimé sous ce titre : Description des diverses qualités du sol de la Haute-Guienne. Pour en réunir les matériaux, il se rendait successivement dans chaque commune avec deux ou trois géomètres ; là, il assemblait les notables, s’enquérait auprès d’eux des besoins du pays, de l’état des impôts et des rentes, et rédigeait un procès-verbal de leurs réponses, qu’il accompagnait de ses observations personnelles. La relation de ce voyage est distincte de la description imprimée ; le manuscrit existe encore aux archives de Rodez. Les réflexions de M. de Richeprey portent l’empreinte de l’esprit le plus libéral ; toutes les exactions le révoltent, toutes les souffrances l’affligent ; il réclame partout l’égalité des charges et l’affranchissement du travail. Tout ce qu’il constate met en lumière un fait qu’il croit local, mais qui se retrouvait en même temps d’un bout du royaume à l’autre, le souvenir d’une ancienne prospérité qui avait disparu depuis plus d’un siècle. Ce précieux document contient probablement le tableau le plus complet qui existe de l’état des campagnes à la fin de l’ancien régime, et, quoiqu’il ne s’applique qu’à une seule généralité, il a un grand intérêt historique.

La session de 1782 s’ouvrit sous de tristes auspices. Le comte de Panat, procureur-syndic, était mort à la peine. « Il n’a pu suffire, disait le rapport de la commission intermédiaire, aux efforts qu’il a dû faire pour accélérer l’application des remèdes que vous opposez aux abus ; il est mort accablé des fatigues d’un travail continuel, après avoir sacrifié au bonheur de la province ses plus douces jouissances, son repos, sa santé, la société de ses amis et de sa famille, l’habitation d’une terre qui lui était chère par le besoin qu’on y avait de ses bienfaits. » On lui donna pour successeur le marquis de Lavalette-Parisot. En même temps le rapport de la commission rend