Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 35.djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

entièrement de cavalerie. Les colonnes par escadron, à intervalle de déploiement, se tenaient massées en arrière du plateau ; elles échappaient à la vue des Français. Derrière la division Picton était la 2e brigade de Ponsonby.

Les réserves firent une troisième ligne : à la gauche et au centre, la division de cavalerie hollando-belge de Collaerts ; la 10e brigade anglaise dans l’angle d’intersection des routes ; la brigade de Lambert près des fermes de Mont-Saint-Jean ; à l’extrême droite, le corps de Brunswick entre Merke-Braine et la route de Nivelles. Ainsi partout les Belges, les Hollandais et les milices de Hanovre et d’Allemagne étaient flanqués et comme gardés à vue par les vieilles troupes britanniques. Chez celles-ci, l’infanterie était formée sur deux rangs, mais prête à se doubler dès qu’elle serait menacée.

L’artillerie couvrait le front des divisions. Au-dessus de la Haie-Sainte, il y avait une batterie de vingt-quatre pièces de canon. Ces dispositions prises, le duc de Wellington se plaça de sa personne à cent pas du bord du plateau, à l’abri de l’escarpement. Il était là, au plus chaud de la bataille ; il tenait son armée dans sa main ; aucun détail d’exécution ne pouvait lui échapper.

Napoléon, dans la reconnaissance qu’il venait de faire, avait jugé avec son coup d’œil ordinaire les circonstances du champ de bataille : il avait vu la droite et le centre de l’ennemi protégés par les difficultés du terrain, et de plus couverts par deux grands obstacles, Hougoumont et la Haie-Sainte, éloignés à peine de 400 à 300 mètres de la ligne de bataille ; mais lorsqu’il s’était arrêté en face de la droite française, il avait remarqué que de ce côté la crête des terrains s’inclinait en pente douce. D’ailleurs cette première ligne était séparée du château de Frichermont par un intervalle vide de 1,600 mètres qui la laissait suspendue sans appui. Ses colonnes d’attaque pourront aisément passer dans cet intervalle. C’est évidemment de ce côté qu’il aura prise le plus aisément sur la ligne anglaise.

Aussi n’y a-t-il aucun doute sur le plan d’attaque qu’il forma à ce moment ; il le dicta à deux généraux assis par terre, autour de lui, sur une butte d’où son regard embrassait le terrain que les deux armées allaient se disputer. Il trompera l’ennemi par de fausses attaques sur Hougoumont et des démonstrations sur Merke-Braine. Quand l’ennemi aura porté ses renforts de ce côté, Napoléon fera sa véritable attaque au côté opposé, sur la gauche anglaise. En refoulant cette gauche qu’ils trouveront sans soutien, les Français se porteront sur Mont-Saint-Jean, à la croisée des routes. L’ordre est donné aux compagnies de sapeurs du corps du général d’Erlon de se tenir prêtes à se barricader dans ce village. De ce côté, la difficulté sera plus faible et la victoire infailliblement plus grande. Vaincus,