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un de ces penseurs qui ont su joindre aux censures les plus impitoyables sur les hommes et les choses de son temps les prévisions les plus sereines sur l’avenir définitif de l’humanité. C’est un bonheur qu’il dut certainement à sa religion, si simple à la fois et si intense. Elle était aux agitations fiévreuses de sa vie ce que les profondeurs de l’océan sont à la surface que les vents soulèvent. Après chaque tempête, le calme inviolable des abîmes s’impose à la masse entière, qui, de nouveau souriante et paisible, réfléchit l’azur immense. Nul n’a mieux savouré que ce rationaliste la puissante volupté des ravissemens mystiques, et nous en pourrions fournir des preuves bien éloquentes, si déjà nous ne craignions d’avoir trop cité.


III

La réputation que Parker devait à son talent oratoire et à son caractère faisait rechercher avidement ses discours par ceux qui ne pouvaient les entendre. Plusieurs journaux politiques les reproduisaient, soit en entier, soit par fragmens, dès qu’ils avaient été prononcés, et les propageaient jusqu’aux confins les plus reculés du territoire. On connaît le prodigieux développement de la presse quotidienne dans l’Amérique du Nord. Les sermons écoutés par l’élite de la population bostonienne circulaient ainsi des villes aux campagnes et allaient trouver jusqu’aux pionniers perdus dans les solitudes du far west. On a calculé que plusieurs d’entre eux avaient été répandus à plusieurs centaines de mille exemplaires dans l’espace d’une semaine. Pour satisfaire à une demande toujours croissante, il en publia lui-même plusieurs écueils, et ce sont ses discours religieux qui forment la majeure partie des douze volumes publiés aujourd’hui sous son nom. Outre les écrits dont nous avons parlé, la collection se compose d’un volume de Miscellanées, contenant plusieurs travaux fort remarquables de critique religieuse, entre autres sur Bernard de Clairvaux et sur la théologie allemande, d’un autre volume renfermant dix sermons sur divers sujets de religion et de morale, d’un troisième intitulé Sermons of Theism, puis de deux autres volumes d’Additional Speeches, lesquels furent encore suivis de trois nouveaux recueils de Speeches, Addresses, etc. Cette longue série offre une fidèle image de cette vie agitée. La lecture en est singulièrement attrayante, d’abord à cause de la variété des questions traitées, mais aussi par la manière dont les sujets les plus rebattus de la religion et de la morale sont rajeunis par cette vigoureuse et spirituelle éloquence. Quelques-uns de ses plus intéressans discours sont consacrés à la mémoire d’hommes illustres de