Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 36.djvu/510

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

donné à l’empereur. Pour ramener la régularité dans notre gestion financière, pour rétablir auprès du public le crédit des finances françaises, M. Fould a proposé à l’empereur de renoncer au droit de décréter des crédits supplémentaires ou extraordinaires. La combinaison recommandée par le nouveau ministre des finances paraîtra hardie à certaines personnes : comment fera-t-on face à l’imprévu, demandera-t-on, si l’on se lie ainsi les mains, et si l’on s’interdit d’avoir recours aux ressources extraordinaires ? Le rapport de M. Fould réfute suffisamment, suivant nous, cette objection. Les besoins imprévus peuvent provenir de petites affaires ou de grosses affaires. S’il se présente dans l’intervalle des sessions une petite affaire, la nécessité par exemple d’envoyer une expédition en Syrie ou au Mexique, le budget de la France est assez ample pour qu’on y trouve aisément, au moyen des viremens, les ressources nécessaires. On peut faire converger vers le service où se manifeste le besoin imprévu les ressources du département ou des départemens ministériels que ce service concerne, et l’on peut attendre la réunion ordinaire de la chambre pour lui demander de voter les sommes qui auront été ainsi détournées de leur destination primitive. Si c’est une grande question qui s’élève, s’il faut pourvoir à quelque grande guerre devenue inévitable, la convocation extraordinaire du corps législatif va de soi. Personne apparemment ne peut songer que des questions de cette importance se puissent engager sans que le pays soit consulté. Nous ne nions point que dans le nouveau système une restriction très sérieuse ne soit mise au goût et à l’habitude de ces dépenses que nous sommes obligés, pour employer le vilain mot technique, d’appeler extra-budgétaires ; mais certes c’est là le mérite et non l’inconvénient du nouveau système. Les chefs de service seront tenus désormais d’apporter plus de soin et d’exactitude dans la confection de leurs budgets ; ils ne devront plus compter sur la complaisance des crédits pour réparer des erreurs d’appréciation ou le défaut de prévoyance. Leur travail sera mieux fait, et, ce qui est à nos yeux un grand avantage, il sera plus sérieusement contrôlé et par l’opinion publique, que l’inconnu et la confusion des crédits ne viendront plus dérouter, et par l’assemblée représentative, qui mettra plus d’application et de zèle à étudier une situation financière dont elle aura sous la main tous les élémens.

Parmi les conséquences des mesures annoncées ce matin par le Moniteur, et auxquelles le sénat, convoqué pour le 2 décembre, aura bientôt donné le caractère constitutionnel, les unes appartiendront à l’ordre financier, d’autres à l’ordre politique. Nous croyons qu’au point de vue financier ces conséquences seront heureuses ; elles sont de nature à ranimer la confiance de cette classe des hommes d’affaires à laquelle M. Fould a fait allusion. Le pays traverse, on le sait, une situation difficile au point de vue économique. La nécessité d’importer des quantités énormes de blé, de faire à l’étranger des paiemens considérables, et cela avec des importations diminuées par des