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REVUE DES DEUX MONDES.

vaise idée ! J’ai eu tort de lui dire… Et Bernard aussi a une idée de nous faire du mal, car je l’ai vu de ma fenêtre. Il n’était point parti… Il marchait du côté du grand rocher. Elle va au fond. Ah ! je le vois, c’est lui, j’en suis sûre. Eh bien ! faut que je lui parle, faut le prendre par la bonté si je peux, ou faut le gronder sans le craindre ; enfin faut empêcher un malheur. Il ne me voit pas ou il ne veut pas me voir… Bernard !… Mon Dieu ! pourvu que mon père ne m’entende pas !… Non, il est déjà loin. Bernard !… Il m’a vue, il vient, il court. Mon Dieu ! mon Dieu ! qu’est-ce que je vas lui dire ?


Scène V.

BERNARD, FRANCINE.
BERNARD.

J’ai pas rêvé, Francine ? Tu m’as appelé ?

FRANCINE.

Oui. Écoutez-moi. Vous ne m’aimez point, ou vous m’aimez très mal, comme un homme sans bonté et sans religion peut aimer. Vous m’avez trompée la première fois. Je vous croyais de bonne parole. Vous êtes revenu au bout d’une heure, et ce que vous m’avez proposé, c’est infâme, entendez-vous ?

BERNARD.

Doucement ; laissez-moi dire aussi, Francine. Je suis revenu parce que votre père me demandait, et je ne vous ai vue alors que devant lui, après lui avoir parlé ; ainsi je n’ai pas pu vous offenser en aucune manière.

FRANCINE.

Si vous ne vous souvenez pas de ce que vous dites et des personnes à qui vous parlez, comment donc faire pour s’entendre avec vous ?

BERNARD.

Si je ne vous respectais pas comme je respecte ma sœur, je vous dirais que c’est vous, Francine, qui rêvez des choses qui ne sont pas.

FRANCINE.

Allons, c’est inutile de vous parler. Sans doute que le vin vous enlève toute idée d’un moment à l’autre…

BERNARD.

Le vin ! J’ai fait serment, il y a un an, de n’en plus goûter, non plus qu’aux autres choses qui font perdre la raison, et j’ai tenu parole, je le jure !

FRANCINE.

Vous n’étiez pas ivre quand mon père est rentré ?

BERNARD.

Devant Dieu, non !