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moins basse que celle du noyau lumineux proprement dit, et qui tienne en suspension la plupart des corps simples que nous retrouvons sur notre planète. Cette grande conception s’accorde bien avec l’hypothèse de Laplace, qui attribuait la formation de tout notre système planétaire au refroidissement graduel d’une nébuleuse unique, où la matière cosmique actuellement condensée dans le soleil, les planètes et les satellites, était primitivement répandue dans l’espace entier qu’occupe notre tourbillon. Les plus petits corps se refroidissent naturellement le plus vite ; la lune est gelée, sans atmosphère, sans eau, sans vie organique ; sous le télescope, elle a quelque chose de morne et d’effrayant. La terre s’est refroidie moins promptement que son satellite, mais bien plus rapidement que le soleil, dont la brûlante atmosphère contient encore les nombreuses substances qui, sur notre planète, sont depuis longtemps condensées et fixées dans les roches solides. Notre atmosphère appauvrie ne contient plus que les élémens nécessaires à l’entretien de la vie organique, l’oxygène, l’azote, le carbone, l’eau, et notre esprit peut difficilement s’accoutumer à l’idée d’une atmosphère chargée de fer, de métaux alcalins, des corps les plus divers en combustion. Il faudrait la plume de Dante pour peindre cette nature à l’état de chaos, cette pluie de métaux en feu, ces nuages lumineux devenant obscurs par le contraste d’une lumière plus ardente, cet océan incandescent du soleil, avec ses tempêtes, ses courans, ses trombes ruisselantes et gigantesques : de tels tableaux mettent au défi les imaginations les plus amoureuses du fantastique et de l’étrange, et nos rêves s’évaporent comme une goutte d’eau devant cette brûlante lave, ce foyer, splendeur du monde, source de toute chaleur, de tout mouvement, de toute vie.

En telle matière, rien n’est plus éloquent que le langage précis de la science ; il tire sa force de son humilité même. Si des vapeurs métalliques entourent le soleil sous forme d’atmosphère, on comprend qu’elles puissent se condenser en nuages, comme la vapeur d’eau dans notre propre atmosphère. Galilée considérait déjà les taches du soleil comme des nuages flottant devant le corps brillant d’où rayonne la lumière ; mais cette hypothèse a été généralement abandonnée des astronomes. Pour faire comprendre les théories qui sont adoptées aujourd’hui sur la constitution physique du soleil, décrivons les apparences qu’il présente lorsqu’on l’examine avec un fort grossissement.

La surface entière paraît couverte d’innombrables petites inégalités, pareilles à des marbrures ou plutôt aux rugosités d’une orange. Sur le fond lumineux se montrent quelques taches foncées, de couleur brun gris ou noire, de formes très irrégulières. Quand